C'est devant La
Chambre de Vincent, une toile de Van Gogh, que le regard
de l'auteur est bouleversé. Lui reviennent, pudiques
et intimes, les images de son enfance passée dans un
internat suisse dont les parents attendent que leur fils y
apprenne "à "être un homme" au
pays des meilleures écoles du monde". Emotion
authentique de l'adulte qui se souvient et raconte sa vie
dans le cercle étroit des "internes profonds",
ces étrangers entre tous les étrangers qui restent
à l'école quand les autres vont passer congés
et vacances en famille. Intensité des relations avec
les enseignants, apprentissage de l'autonomie forcée
et de la solitude, premières amours aussi chastes qu'ardentes.
Retour en mémoire, aussi, des images du père
auquel il voue un respect et un attachement admiratifs.
Ainsi, l'art et le destin tragique
de Van Gogh, et la sensibilité particulière
de l'auteur à ses toiles sont autant de voies vers
le souvenir et vers une réflexion sur le retrait, le
suicide et la mort. Le génie de Van Gogh est peut-être
célébré ici dans ce qu'il révèle
à la fois d'universel et d'intime à chacun d'entre
nous.
Metin Arditi
est l'auteur de trois essais,
Mon cher Jean. De la cigale à la fracture sociale,
Le Mystère Machiavel et Nietzsche ou l'insaisissable
consolation.
Metin Arditi, La chambre de Vincent, Editions
Zoé, 2002
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