Un travail constructif, de terrain,
qui engage les structures et les gens au niveau local :
tel est le projet de Lettres frontière, notre invité
de ce mois. Loin de se limiter à rendre des livres,
des éditeurs et des auteurs visibles, le projet implique
le public en qualité de lecteur et de critique, dans
une dynamique constructive et de long terme.
Une telle adéquation entre
l'organisation et son public rend manifeste la dimension
civique de la culture, et par là le sens politique
qu'elle peut avoir. C'est là une présence
bien plus subtile et riche que le cadre simpliste brossé
par le ministre de la culture Pascal Couchepin dans ses
prises de positions récentes. Des interventions certes
avant tout destinées à écarter des
personnes du pouvoir dans ce domaine, et qui n'auront convaincu
que les plus candides. Mais qui ne méritent pas moins
d'être discutées, de par le fait même
qu'elles émanent de ce ministre et bénéficient
de ce fait d'une diffusion sans rapport avec leur pertinence.
C'est ce que nous avons tenté de faire à travers
un dossier qui a tourné court. Les restes, menus
mais intéressants, sont à lire en rubrique
A la Une.
Une protestation contre le simplisme
se dégage aussi de la passionnante interview que
Thomas Hürlimann a donnée au Culturactif au
sujet de son livre Mademoiselle Stark. Si Hürlimann
y revendique de façon à la fois vivante et
convaincante le " conte qui ment vrai ", Renato
Martinoni s'en tient quant à lui à un habillage
ténu de faits historiques pour raconter l'histoire
à la fois insolite et emblématique du faux
chef Cherokee Tewanna Ray. Une autre ouvrage tessinois est
à découvrir dans nos pages ce mois : Anna
Ruchat, traductrice de Thomas Bernhard, Paul Celan et bien
d'autres prend cette fois la plume en narratrice dans un
livre exigeant et de grande valeur.
Côté romand, la redécouverte
de Gustave Roud amorcée il y a quelques mois par
plusieurs éditions (dont la correspondance avec Philippe
Jaccottet) se poursuit avec la publication de son journal,
que commentent pour le Culturactif ses éditrices
Anne-Lise Delacrétaz et Claire Julier. Des Grisons
romanches, c'est une triste nouvelle qui nous parvient :
la disparition du poète Clo Duri Bezzola, que notre
revue Feuxcroisés avait présenté l'an
dernier. C'est ce dossier que nous vous proposons aujourd'hui
en ligne, en guise d'hommage à cet auteur attachant.
La fraternité est l'un des
maîtres mot de la poétique de Philippe Rahmy
: l'Inédit du mois est de sa plume, et paraîtra
au printemps 2005 chez Cheyne. C'est une évocation
de la douleur endurée par l'auteur. Jamais pourtant
il ne s'approche de la complaisance ou du narcissisme :
le soussigné a vécu ce texte comme un acte
d'amour.
Enfin, nous sommes heureux et fiers
de présenter un nouveau volume coédité
par nous : Figure pour s'abolir / Figura para abolirse
est la première publication française de textes
d'Américo Ferrari, grand poète péruvien
établi non loin de Genève. Une poésie
de très haute tenue qui nous renvoie à la
fois à Michaux et à Borgès - signe
qu'existent encore les trésors enfouis tout près
de nous.
A tous, nous souhaitons une bonne
lecture.
Francesco Biamonte
Page créée le 06.09.04
Dernière mise à jour le 06.09.04
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