L'entretien en français
a été publié dans la Revue du Service
de Presse Suisse : "Feuxcroisés 2"
Nous avons demandé à Patricia Zurcher de nous
présenter une version en allemand.
français - allemand
français
P. Z. - Erica Pedretti, vous êtes
à la fois écrivain et sculpteur; comment choisissez-vous
lart dans lequel vous allez tenter de faire passer
un contenu?
E. P. - Jignore si cest
moi qui choisis un art ou si cest cet art qui me choisit...
Souvent, et surtout dans mon travail de sculpteur, le but
nest pas tellement de faire passer des contenus, je
naime pas lart littéraire. Les différents
objets volants que jai réalisés
disent certainement quelque chose, mais on ne peut pas le
mettre en mots, sinon, je ne les ferais sans doute pas,
jopterais pour lécriture. Mais la sculpture
est mon premier moyen dexpression; ce nest que
bien plus tard que jai commencé à écrire
et à publier des livres. Et même lorsque jécris,
mon point de départ nest pas forcément
un élément concret que je voudrais transmettre.
Dans le fond, lécriture possède pour
moi une toute autre fonction. Cest durant le processus
décriture que quelque chose se développe,
ce qui ne signifie pas que jécris sans but
ou sans intention. Mais jessaie tout de même
de ne pas trop coller aux contenus. Pendant que jécris,
et du fait même que jécris, la langue
prend un cours qui conduit avec beaucoup plus de précision
aux choses que je voulais exprimer, sans que je laie
planifié avant. Pour ce qui est de la sculpture,
jai généralement une vague idée
en tête et ce nest quindirectement que
quelquun pourra peut-être en conclure quelque
chose. Ce nest quaprès coup que je remarque
que jai peut-être exprimé quelque chose
de très important pour moi.
P. Z. - Lécriture
vous permet-elle déchapper temporairement à
la sculpture et vice-versa ou menez-vous ces deux activités
de front?
E. P. - Non, je ne me concentre toujours
que sur une seule activité. Cest aussi une
question de temps, les deux exigent que lon sy
plonge vraiment, que lon se concentre. Cela magace
parfois, quand je réalise un gros travail et que
je me coupe soudain de lécriture une année
durant. Et quand jécris, il y a toujours des
moments où tout se complique, mes projets ne sont
jamais simples, et ce que je fais, je veux que ce soit bon,
que ce soit juste, que le rythme soit juste, que la langue
soit juste, et quant cela se corse, je vois soudain se pointer
des échappatoires, ce qui signifie pour moi quil
vaut mieux que je marrête décrire
temporairement et que je réalise lautre projet.
P. Z. - Dans Valerie oder
das unerzogene Auge et dans dautres textes aussi,
vous parlez de lart. Lécriture vous sert-elle
aussi à prolonger les réflexion que font naître
votre activité de sculpteur?
E. P. - Dans Valerie...,
je men prends à une certaine mentalité
dartiste que je déteste, le fait que lon
se serve de lart pour justifier un certain égocentrisme
et que lon soit prêt à tout pour lart.
Personnellement, je suis convaincue que lart exige
un maximum de concentration, et quil est bon de sisoler
et de se protéger un peu quand on travaille à
quelque chose, mais jamais je ne le ferais dans les conditions
que je décris dans ce livre. Alors que son amie est
mourante et attend sans doute autre chose de lui, le peintre
loublie pour sa peinture et ne perçoit plus
delle que son apparence extérieure, il ne lassiste
pas. Pour moi, une telle attitude serait impensable. Mais
dans le fond, je naime pas écrire sur lart.
Sur lart, cela signifie déjà
une traduction, et celle-ci ne rejoint jamais loriginal.
P. Z. - La problématique
de lécriture apparaît aussi dans vos
textes; les passages où elle apparaît vous
servent-ils aussi à créer une certaine distance
par rapport à ce que vous décrivez?
E. P. - Oui. Engste Heimat
par exemple, je lai écrit en bonne partie dans
ma caravane, et lon y retrouve ce que jai vu
depuis ma fenêtre, ce qui a passé devant au
moment où jécrivais. Jessaie toujours
dintégrer dans lhistoire ce qui se passe
pendant que jécris, parfois en lattribuant
aux protagonistes. Dans Engste Heimat, il y
a aussi la narratrice qui raconte et qui envoie Anna, son
alter ego, en Tchécoslovaquie; je montre ainsi quil
ne sagit pas dune biographie, quil sagit
vraiment dune fiction, donc que quelquun est
assis là et travaille à quelque chose qui
deviendra cette histoire, même si cette même
histoire contient beaucoup déléments
biographiques. Et puis, il y a ces moments aussi où
lon se demande pourquoi lon se replonge dans
des choses aussi tristes qui, Dieu merci, sont passées
pour moi, alors que lon se trouve dans un endroit
où tout est si beau...
P. Z. - Vous préférez
visiblement un style fragmentaire aux récits lisses
et linéaires. Ce style vous est-il dicté par
ce que vous racontez?
E. P. - Oui, sans doute, et peut-être
aussi par mon propre chaos. Quand jai commencé
à écrire, javais des modèles.
Jadmirais Dostoievski, Dickens, qui avaient un rythme
si continu, et cest ainsi que jai commencé
à écrire Harmloses, bitte, mes
souvenirs de la fin de la guerre, lorsque jétais
encore un enfant ou à moitié enfant, et puis
je me suis aperçue que cela conférait à
ce récit quelque chose danecdotique, de lisse,
qui navait plus rien en commun avec mes souvenirs,
bien que cette version contenait plus de faits que la version
définitive. Jy ai alors travaillé jusquà
ce que ce récit corresponde, de par sa forme, à
une certaine atmosphère de peur, dans laquelle jai
inséré lespoir et les belles choses
qui se sont produites aussi. Jy ai ajouté aussi
la comparaison avec lEngadine, donc le fait que lon
jouisse de quelque chose dincroyablement beau et que
soudain lon se rappelle, de par lenfance que
lon a vécue, que tout cela est fragile, que
tout pourrait être détruit, comme cela a été
détruit ailleurs et continue dêtre détruit.
Seule cette forme me permettait de dire cela. Et depuis,
rien na changé à ce niveau-là:
lorsquun texte devient trop lisse, cest que
quelque chose ne va pas, cest que jai écrit
une histoire de manuel scolaire.
P. Z. - Comment votre style a-t-il
évolué depuis Harmloses, bitte
jusquà votre dernier livre?
E. P. - Au début de Harmloses,
bitte, je dis que les drames qui se sont déroulés
devraient être tus, parce quil est impossible
de les raconter sans les fausser. Jen était
convaincue alors et jen avais fait lexpérience.
Javais remarqué que je ne me croyais plus moi-même
quand jen faisais de jolis récits. Entretemps,
jai acquis un peu plus dexpérience dans
ce domaine et une plus grande distance aussi, et peut-être
que je fais un peu plus confiance à la langue et
quil mest possible de trouver un style un peu
plus cohérent. Le rythme de la langue me paraît
aussi important que le contenu, le genre des phrases, le
genre des mots, la longueur des phrases ou des mots... Lorsque
jécris, jessaie dentendre mes phrases,
et si le rythme nest pas bon, cest que quelque
chose ne joue pas. Apparemment, chacun de nous a ses propres
rythmes et il faut quils soient justes.
P. Z. - Quel rôle les citations
jouent-elles dans vos textes?
E. P. - Un très grand rôle.
Jai passé une année chez mes grands-parents,
je les adorais et ils madoraient. Tous les jours,
avant daller à lécole, jallais
me promener avec mon grand-père, et à huit
ou neuf ans, je lentendais réciter Faust
dans son entier, et cest parce que jaimais tellement
mon grand-père que ce quil citait devenait
pour moi aussi vivant que ce qui nous entourait. Dans le
fond, cest aussi le début de mon amour de la
littérature, et cest pour cela aussi que jai
confiance en elle, dans ses capacités de transmettre
des choses. Cest lune des rares valeurs de mon
enfance qui est demeurée intacte, toutes les autres
se sont mises à vaciller un jour ou lautre.
P. Z. - Mais pour que la littérature
puisse transmettre quelque chose, une certaine distance
est nécessaire?
E. P. - Oui, certainement. Cest
une question que je me pose encore. Dun côté,
je suis convaincue que la plupart des livres qui me passionnent
sont fait dun matériau qui a passionné
aussi leur auteur. Je ne crois pas que lon puisse
simplement choisir un sujet et en parler de façon
passionnante, si ce sujet ne nous concerne pas à
titre privé. Dun autre côté, quand
on est plongé dans quelque chose, quand on est personnellement
touché, je ne crois pas quil soit très
facile den parler et de trouver une forme qui ne soit
pas sentimentale ou de mauvais goût. Mettre en forme
quelque chose que lon est en train de vivre me paraît
presque impossible.
P. Z. - Mais comment peut-on se
distancer de souvenirs tels que ceux que vous décrivez?
E. P. - Il y a une certaine distance.
Et beaucoup de ces souvenirs étaient bien refoulés.
Ce nest pas un hasard si les souvenirs les plus douloureux
napparaissent dans la littérature que cinquante
ans après les événements décrits.
Pour moi, tout cela appartient désormais au passé.
Ce qui me fait mal et me révolte, cest que
les choses se répètent ainsi. Que même
dans des pays qui ont déjà vécu tout
cela une fois, comme la Yougoslavie à présent,
une guerre éclate pour la seconde fois dans une vie
dhomme, alors que la plupart des gens savent pertinemment
ce que cela signifie. Ce ne sont pas de jeunes aventuriers
qui ne savent pas où ils mettent les pieds...
Cest peut-être
aussi lune des raisons pour lesquelles on écrit
ces choses-là. Si tout cela était terminé
une fois pour toutes, on ny penserait plus, peut-être
pourrait-on alors ne plus y penser, et quil ny
aurait plus besoin décrire des livres à
ce sujet, je ne sais pas.
P. Z. - Dans Engste Heimat,
vous émettez des doutes quant à la réussite
du personnage de Gregor, vous doutez quil soit possible
de représenter de façon fidèle une
personne qui continue à vivre dans votre mémoire.
Cela signifie-t-il que pour vous, seuls les personnages
créés de toute pièce peuvent devenir
de vrais personnages?
E. P. - Non, jai voulu exprimer
tout dabord ma crainte quun souvenir encore
vivant pour moi ne se transforme en histoire, donc ma crainte
de perdre quelque chose aussitôt que je lécris.
Jessaie den faire quelque chose de vivant, jessaie
de faire dune personne qui vit dans mon souvenir,
bien quhélas elle ne soit plus, un personnage
vivant, mais cela devient quand même un personnage
quil sagit ensuite de compléter et qui
se met à vivre sa propre vie. Je navais pas
envie que cet homme qui métait si cher devienne
par ma plume un personnage qui ne soit plus lui. Mais cela
ne signifie pas forcément quun personnage fictif
ne peut pas devenir vivant, il peut même devenir très
vivant, mais je ne veux pas quil recouvre entièrement
une personne qui mest proche ou quil la remplace.
P. Z. - Dans Engste Heimat,
il est question aussi du concept assez délicat de
la patrie. Quelle est votre définition
de la patrie?
E. P. - Honnêtement, je ne
me suis jamais servie de ce mot et je continue à
léviter. Dans ce titre, je lai cité
avec un certain cynisme, en lassemblant avec le mot
engste que lon peut lire ou entendre différemment
(N.d.T. Ängste). Mais je ne nie pas que
lon soit marqué par une région, et ces
prés et ces collines, ces paysages dans lesquels
je vois en plus le Goethe de mon grand-père lorsque
jy suis, nexistent nulle part ailleurs. Bien
sûr quil existe un sentiment qui renvoie à
ce concept, mais ne croyez pas que jaie le mal du
pays. Bien au contraire, je suis contente dêtre
là où je suis. Et pourtant, chaque fois, jaccepte
les invitations qui me viennent de là-bas; sans doute
y a-t-il quand même quelque chose qui me pousse à
y retourner.
P. Z. - Dans vos livres, il est
souvent question des mécanismes de la mémoire.
Avez-vous limpression, avec les années, de
mieux comprendre et maîtriser ces mécanismes?
E. P. - Je nen sais rien. Dans
mon dernier livre, jai tenté de reconstituer
une mémoire en ruines, une mémoire que jai
pu observer longuement, celle dune vieille tante qui
métait chère, et ce jusquaux dernières
phrases complètement décousues, qui sont hélas
presque authentiques. Ce qui ma fascinée, cest
ce que la langue fait avec quelquun, le fait quun
être silencieux sa vie durant se mette à parler
aussitôt que son contrôle sur soi abaisse ses
barrières, et que cet être se mette à
dire alors ce que jamais de sa vie il naurait dit...
Quand soudain la langue commence à se mouvoir et
à parler toute seule, cétait comme si
langue sétait mise à parler à
travers elle...
P. Z. - Dans ce dernier livre,
vous avez suivi le processus de la remémorisation
jusquà la mort de la narratrice qui se souvient.
La mémoire restera-t-elle un sujet important de vos
livres à venir ou la considérez-vous comme
un sujet clos désormais?
E. P. - En réalité,
je ne sais pas si elle est morte, certaines personnes mettent
du temps à sen aller... Mais jai lintention
de parler encore du troisième enfant de cette famille.
Dans Engste Heimat, cest Gregor qui est
plus au moins au centre du récit, et dans mon dernier
livre, cest Sophie. Mais il y a encore la petite soeur,
Fanny. Ce sont des caractères totalement différents
avec pourtant quelques points communs, des personnalités
qui posent aussi un regard très différent
sur leur passé et qui ont maîtrisé ou
pas maîtrisé leur vie de manière très
différente. Et maintenant, je voudrais décrire
Fanny, ce qui me permettrait de livrer trois regards différents
sur trois vies totalement différentes, mais provenant
dune même souche. Jignore si jy
parviendrai. Je voudrais aussi que la forme du récit
soit à nouveau totalement différente de celle
des deux autres livres.
Entretien et adaptation française:
Patricia Zurcher
allemand
P. Z. - Erica Pedretti, Sie sind
zugleich Schriftstellerin und Bildhauerin; wie wählen
Sie jeweils das Medium aus, in dem Sie etwas mitteilen werden?
E. P. - Ich weiss nicht, ob ich das
Medium auswähle oder das Medium mich auswählt.
Es handelt sich, vor allem in der bildnerischen Arbeit,
nicht so sehr darum, Inhalte mitzuteilen. Ich mag keine
literarische Kunst, also mache ich sie auch nicht. Die Fliegenden
Objekte, von denen ich verschiedene gemacht habe,
teilen sicher etwas mit, aber das ist nicht so verbal zu
übersetzen, sonst würde ich es vielleicht gar
nicht machen, sondern nur schreiben. Aber es ist an sich
meine erste Ausdrucksform. Bücher zu schreiben und
vor allem zu publizieren, habe ich erst viel später
angefangen. Das Schreiben hat für mich eigentlich eine
ganz andere Funktion: Während des Prozesses des Schreibens
entwickelt sich etwas, was nicht heisst, dass ich nicht
irgendwo ein Ziel habe oder etwas vorhabe, aber ich versuche
doch sehr stark nicht so an den Inhalten zu kleben, sondern
beim Schreiben, durchs Schreiben, nimmt die Sprache einen
Verlauf, der viel genauer, manchmal auf überraschende
Weise auf die Dinge bringt, die man eigentlich zum Ausdruck
bringen möchte, ohne dass ich es vorher genau so geplant
hätte. Bei der bildenden Kunst schwäbt mir etwas
vor und erst indirekt kann jemand vielleicht daraus auf
Zustände schliessen.
P. Z. - Dient Ihnen das Schreiben
auch dazu, Ihre bildhauerische Aktivität für eine
Zeitlang beiseite zu lassen oder laufen beide Aktivitäten
parallel?
E. P. - Nein, sie laufen abwechslungsweise,
immer, und das ist auch eine Zeitfrage; man muss sich in
beides vertiefen, also sich auf etwas konzentrieren. Ich
habe noch nie beides parallel gemacht. Manchmal ist es für
mich auch ärgerlich, wenn ich eine grosse Arbeit mache
und dann falle ich plötzlich ein Jahr lang aus meinem
Schreiben. Vor allem, das Schreiben wird ja immer wieder
schwierig und dann kommen eben die Ausweichsmöglichkeiten,
das heisst, besser man lässt dann das Schreiben sein
und macht die andere Arbeit bis sie fertig ist.
P. Z. - In Valerie oder das unerzogene
Auge, aber auch in anderen Texten, schreiben Sie über
Kunst. Erlaubt Ihnen das Schreiben auch, die Überlegungen,
die Ihnen Ihre Kunst inspiriert, weiterzuführen?
E. P. - Bei Valerie handelt es sich
vielleicht auch um einen Angriff auf eine bestimmte Künstlermentalität,
die mir zuwider ist, also dass man die Kunst als Ausrede
für eine bestimmte Egozentrik benützt und damit
buchstäblich über Leichen geht. Aber an sich möchte
ich nicht über das Malen schreiben, also über
Kunst schreiben. Es fällt mir sehr schwer. Es handelt
sich dabei immer um eine Übersetzung und die bleibt
immer hinter dem Original zurück. Ich fühle da
nur Ungenügen an meinem Text und komme nicht weiter.
P. Z. - Die Problematik des Schreibens
kommt auch in Ihren Texten vor; dienen Ihnen die Stellen,
die davon handeln, auch dazu, eine gewisse Distanz zum Beschriebenen
herzustellen?
E. P. - Ja, also Engste Heimat zum
Beispiel habe ich in grossen Teilen in meinem Wohnwagen
geschrieben und es kommt darin vor, was ich da sehe, was
hier vorbeigeht. Ich versuche in diesem Buch und in den
meisten anderen auch das, was während des Schreibens
passiert, in die Geschichte einzubringen, manchmal indem
ich es den Protagonisten unterjubele. In Engste Heimat gibt
es die Erzählerin, die erzählt und ihr Alter ego
in die Tchekoslovakei schickt, um zu zeigen, dass es sich
nicht um eine Biographie handelt, dass es sich wirklich
um Fiktion handelt, dass also jemand dasitzt und an etwas
arbeitet, das dann diese Geschichte wird, und dass man das
nicht rein biographisch liest, obwohl sehr viel biographisches
Material verarbeitet ist.
P. Z. - Sie mögen anscheinend
lieber Fragmente als schöne, glatte Erzählungen.
Ist dieser Stil durch das Erzählte bedingt?
E. P. - Ja, wahrscheinlich schon,
vielleicht auch durch mein eigenes Chaos. Als ich anfing
zu schreiben, habe ich Dostoievski, Dickens bewundert, so
kontinuerlich schreiben zu können und habe auch so
angefangen. Mit Harmloses bitte, die Erinnerungen an das
Kriegsende, als ich noch ein Kind war oder ein halbes Kind,
habe ich aber gemerkt, dass diese Erzählung so etwas
anekdotisches bekommen hat, so etwas glattes, das mit meinen
Erinnerungen überhaupt nichts mehr zu tun hatte, obwohl
mehr Fakten da waren als in der endgültigen Fassung.
Ich habe dann solange daran gearbeitet, bis es von der Form
her dem Erzählten entsprochen hat, nämlich einer
bestimmten Atmosphäre der Erwartungsangst, der Angst.
Ich konnte es nur in dieser Form mitteilen. Und das stimmt
eigentlich seither immer: Wenn es allzu glatt wird, dann
stimmt es nicht, dann ist für mich irgendetwas verlogenes,
es gibt dann Schulbuchgeschichten.
P. Z. - Was hat sich in Ihrem
Stil seitdem verändert?
E. P. - Am Anfang von Harmloses bitte
steht unwahrscheinlich, falsch und stillos wie alle
Geschichten, die nicht erfunden sind, die auf jeden Fall
verschwiegen werden müssen, weil es unmöglich
ist, sie wahr wiederzugeben. Es war meine Überzeugung
und auch meine Erfahrung. Ich habe gemerkt, dass ich es
mir selber nicht mehr glaube, wenn ich das so schön
schreibe. Inzwischen habe ich ein bisschen mehr Erfahrung
mit dem Schreiben und grössere Distanz. Vielleicht
vertraue ich jetzt der Sprache etwas mehr und es ist mir
auch möglich, eine zusammenhängendere Sprache
zu finden. Der Rhytmus der Sprache scheint mir da genauso
wichtig wie der Inhalt, die Art der Sätze, die Art
der Wörter, die Satzlänge, die Wortlängen.
Es scheint mir genauso wichtig oder fast so wichtig am Ende
wie der Inhalt. Beim Schreiben versuche ich, meine Sätze
zu hören und wenn sie nicht im richtigen Rhytmus sind,
dann geht es nicht, dann stimmt es einfach nicht. Offensichtlich
hat jeder Mensch sein ganz eigenes Tempo und seine eigenen
Rhytmen und das muss stimmen.
P. Z. - Welche Rolle spielen Zitate
in Ihren Texten?
E. P. - Eigentlich eine sehr grosse
Rolle. Ich habe ein Jahr lang bei meinen Grosseltern verbracht
und ging täglich mit dem Grossvater noch vor der Schule
spazieren. Ich habe mit acht, neun Jahren den ganzen Faust
rezitiert gehört und weil ich den Grossvater geliebt
habe, war für mich der Spaziergang ebenso lebendig
wie das Zitierte. Eigentlich ist das auch der Anfang meiner
Liebe zur Literatur; sie ist eines der wenigen Werte meiner
Kindheit, die gleich geblieben sind. Die anderen sind alle
ins Wackeln gekommen.
P. Z. - Um es der Literatur zu
ermöglichen, etwas zu übermitteln, braucht es
aber auch eine gewisse Distanz zum Erzählten?
E. P. - Ja, sicher. Das ist etwas,
was ich mich immer noch frage. Einerseits glaube ich, dass
die meisten Bücher, die mich wirklich fesseln, wahrscheinlich
aus Material gemacht sind, die den Autor auch sehr gefesselt
haben. Ich glaube nicht, dass man sich einfach irgendein
Thema vornehmen kann und dann interessant darüber schreiben
kann, wenn man nicht selbst etwas mit diesem Thema zu tun
hat. Irgendwo muss mir die Sache sehr nahe gehen. Und gleichzeitig
kann man sich natürlich so Notizen machen, aber wenn
man ganz in der Sache drin ist, davon selbst betroffen ist,
dann glaube ich, dass es nicht sehr leicht ist, das so zu
gestalten, dass es nicht sentimental oder kitschig wird.
Das zu gestalten, während man es erlebt, ist fast unmöglich.
P. Z. - Distanz zu Erinnerungen
wie die Ihrigen, ist das überhaupt möglich?
E. P. - Es ist Distanz. Und viele
dieser Dinge waren sehr gut verdrängt. Es ist kein
Zufall, dass die ganz schrecklichen Dinge fünfzig Jahre
nachdem sie passiert sind erst geschrieben werden. Für
mich sind das jetzt tempi passati. Was mich
unglücklich macht und entsetzt, ist, dass sich die
Sachen so wiederhohlen. Dass selbst in Ländern, die
das schon einmal erlebt haben, wie jetzt in Jugoslavien,
nochmal in einem Menschenleben ein Krieg ausbricht, wo doch
eigentlich die meisten Menschen wissen, was das bedeutet.
Was mich unglücklich macht und
entsetzt, ist, dass sich die Sachen so wiederhohlen. Dass
selbst in Ländern, die das schon einmal erlebt haben,
wie jetzt in Jugoslavien, nochmal in einem Menschenleben
ein Krieg ausbricht, wo doch eigentlich die meisten Menschen
wissen, was das bedeutet.
P. Z. - In Ihren Büchern
ist sehr viel von den Mechanismen der Erinnerung die Rede.
Haben Sie das Gefühl, Sie sind diesen Mechanismen irgendwie
näher gekommen und verstehen sie besser?
E. P. - Das weiss ich nicht. Ich
versuche ja in meinem letzten Buch ein ruiniertes Gedächtnis
zu rekonstruieren, mit dem ich sehr viel Erfahrungen gemacht
habe, mit einer alten Tante, und dies bis zu den letzten
zerfasernden Sätzen, die leider fast authentisch sind.
Was mich dabei fasziniert hat, ist das, was Sprache mit
einem Menschen macht, also dass ein ausgesprochen stiller
und ruhiger Mensch, sobald seine Selbstkontrolle nachlässt,
dann zu reden anfängt und auch das sagt, was er sein
Leben lang nie gesagt hätte. Das hat mich fasziniert,
also wenn dann plötzlich die Sprache sich regt und
dann von alleine redet.
Ich versuche ja in meinem letzten Buch
ein ruiniertes Gedächtnis zu rekonstruieren
Entretien et adaptation française:
Patricia Zurcher
Page créée le 01.10.99
Dernière mise à jour le 01.10.99
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