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Erika Burkart

  Erika Burkart
 

Erika Burkart est née en 1922 à Aarau; elle a été institutrice jusqu'en 1953, tout en publiant parallèlement des romans et des poèmes. Dès 1953, elle se consacre librement à l'écriture.

Elle vit toujours dans la maison familiale Kapf dont elle parle dans ses souvenirs d'enfance - une vieille maison de plaisance des princes-abbés de Muri, où son père avait une auberge.

Parmi ses publications les plus récentes:

Das Schimmern der Flügel, roman, 1994
Grundwasserstrom, notes
Stiller fernster Rückruf, poèmes 1997
Lagsamer Satz, 2002

De nombreux prix sont venus saluer son œuvre, dont, récemment, le Joseph-Breitbach-Preis der Mainzer Akademie der Wissenschaften.

Schweigeminute, de 1988, avait paru dans la collection CH/L'Aire, sous le titre de Minute de silence, les poèmes étant traduits par une pléiade des poètes les plus sensibles de la Suisse romande.

Et la revue Feuxcroisés a publié un dossier à son sujet dans son No3 (2000).

Elle nous fait aujourd'hui cadeau au Culturactif de poèmes très récents, très décantés: essences pures de sa poéticité.

 

  Inédit
 

Poèmes

Schnee

Botschaft vom Himmel
aufgegeben
in einem meiner
früheren Leben;
die Zeichen Kristalle,
Splitter von Sternen,
Runen die Spuren
von Mensch und Reh -
- blau-weisse Waldnacht,
Chiffre Schnee.

Juli 2003

 

Neige

Message du ciel
expédié
lors de l'une de mes
vies antérieures;
les signes des cristaux,
fragments d'étoiles,
signes runiques, traces
d'humains et de chevreuils -
nuit de forêt bleue et blanche,
chiffre neige.

Juillet 2003

 

Erinnertes Blau

Mir zärtlichste Stimme.
Meisengewisper im blattlosen Busch,
erinnert sich nach froststarrem Winter
das Eis seiner Herkunft.

Seele Wasser; unter Nebel
im scheuen Licht
ihre Wiedergeburt.

Juli 2003

 

Souvenir de bleu

La voix pour moi la plus tendre.
Susurrement de mésanges dans le buisson sans feuilles:
la glace se souvient de son origine
après l'hiver raidi par le gel.

Âme l'eau; sous le brouillard,
dans la lumière timide,
sa renaissance.

Juillet 2003

 

April

Auf Lorbeerblättern ein weisser Schimmer,
als blühte der Strauch verfrüht -
in der Frostnacht
heimgesucht im eignen Geblüt,
ist mir bang vor der Würghand, ich wache,
sehe am Morgen
unter Schauern von Schnee
und Sonnenblitzen
Knospen leuchten mit Augenlicht;
mich friert und mir graut,
schau ich, Natur,
in dein entblösstes
Zwie-Gesicht.

Juli 2003

 

Avril

Sur des feuilles de laurier un reflet blanc,
comme si l'arbuste fleurissait trop tôt -
envahi dans mon propre sang,
pendant la nuit de givre,
j'ai peur de la main étrangleuse, je veille,
vois au matin
sous des giboulées de neige
et des éclairs de soleil
étinceler des bourgeons avec des yeux de lumière;
j'ai froid, et l'horreur me prend
quand je regarde, Nature,
ton visage ambigu
mis à nu
.
Juillet 2003

 

Die Nacht

Durchwirkt
von der Geheimschrift der Zweige,
stimmt der Himmel sich ein
auf den Schwarzen Planeten.
Im Herzumdrehen
wird alles schwarz sein,
der Wald, das Feld, seine Muhme, das Moor.

Schwarz passieren Bäume die Grenze,
erlöschen im Wasser Gesicht und Licht,
rollt der Igel sich ein, kriechen Hecken,
setzt Zaun-von Zaunpfahl sich ab,
befühlt der Wind schwarze Steine,
wachsen Steine sich ein ins Grab.

Weiss scheint allein
das unbeschriebene Blatt,
ein Brief von Unbekannt,
nachts zu lesen,
ohne Anschrift und Gruss,
eine Seite Schnee
aus dem Buch von einst.

Juli 2003

 

La nuit

Strié
par l'écriture secrète des branches,
le ciel prend le ton
de la planète noire.
En un clin de cœur
tout va être noir,
la forêt, le champ, son aïeule, le marais.

Noirs, les arbres passent la frontière,
s'éteignent dans l'eau visage et lumière,
s'enroule le hérisson, rampent les haies,
le pieu se distingue du pieu,
le vent palpe les pierres noires,
des pierres prennent racine dans la tombe.

Seule semble blanche
la page vierge,
lettre de l'inconnu
à lire de nuit,
sans adresse ni salut,
une page de neige
tiré du livre de jadis.

Juillet 2003

 

Schlaf und Erwachen

Schlaf der abtaucht in sumpfiges Dunkel,
der steckenbleibt halbwegs
in Fallen des Vortags,
Missgeschicke, Verweigerungen,
das Rad der Vergeblichkeit, traumlang
sein Leerlauf, unklärbar Trübes:
der blutende Finger, das nicht
anzuhebende Brett auf Saaten,
erstickende Keime, der Fuchs im Wald,
er verfolgt micht, hat die Tollwut -
das verschlosseneTor, die Drohgebärde -

Schlaf der mündet
in entstirnte Leere,
Mutter wo bist du?
Wo bist du, Erde?

Ich erwache, erleichtert,
dass die misslungene Arbeit,
das Fuchsgesicht eine Nachtmahr,
dass alles ein Traum war,
und der Vogel von morgens vier
mir aus der tastenden
Seele spricht.

Juli 2003

 

Sommeil et réveil

Sommeil qui plonge dans une obscurité fangeuse,
coincé à mi-chemin
dans les pièges du jour précédent,
adversités, refus,
la roue de l'inanité, tout le long d'un rêve
sa marche à vide, des opacités non-clarifiables:
le doigt ensanglanté, la planche impossible à
soulever sur les semis,
des germes qui étouffent, le renard dans le bois,
il me poursuit, il a la rage -
le portail verrouillé, le geste de menace -

Sommeil qui débouche
dans le vide privé d'étoiles
Mère où es-tu?
Où es-tu, Terre?

Je me réveille, soulagée
que le travail raté,
la face du renard, fable nocturne,
aient été, tout cela, un rêve,
et que l'oiseau de quatre heures du matin
parle selon mon âme
tâtonnante.

Juillet 2003

 

Orpheus

Wer sich umschaut,
erinnert.
Das Erinnerte zieht sich zurück.

Heimgesucht
von verlorenen Bildern,
verliert der Erinnerer
sich selbst.

Orpheus!
Dreh dich nicht um.
Vor dir erscheint, erkennbar
an der nie zu lösenden Gleichung,
was war.

Juli 2003

 

Orphée

Qui regarde derrière soi,
remémore.
L'évoqué se retire.

Assailli
par des images perdues,
l'évocateur se perd
lui-même.

Orphée!
Ne te retourne pas.
Devant toi se révèle, discernable
à l'équation qui ne se résout jamais,
ce qui fut.

Juillet 2003

 

Verlorene Worte

Worte haben mit Warten zu tun,
verpuppt verwandeln sie sich,
bilden Organe und können fliegen;
gewachsen im Dunkel,
reflektieren sie Licht,
erkennt sich in ihnen
die janusköpfige Schöpfung.

In den Regen gesprochen,
ins Nachtbuch geschrieben. -
Blutfleck und Steinschrift,
Kreide und Blei-Stift,
die unaustilgbaren Tinten der Schuld,
das Zeichen im Sand, die Chiffre im Schnee,
Zauberwort Leben; LEben,
früh verschattet von Todesweh.

Das Wort, das zu spät,
das nie uns erreicht;
der in Bildern verschlossene Herzort,
strömende Wörter; die Umkehr der Ströme,
spräche Einer das Eine Wort.

Verwehte Laute, erwürgte Silben,
Flüster-Vokabeln von Gras und Wind,
vertraut den Tieren, es sind die Kinder,
die sie imitieren, es ist der Dichter,
der lauter schweigt,
weisse Westen töten
mit schwarzem Wort.

Gegen-Worte zu suchen,
findet abseits sich, wer schreibt.

Traduction française de Monique Laederach

 

Mots perdus

Parole est parent de patience.
Cachée dans des chrysalides, elles se transforment,
engendrent des organes et savent voler;
grandie dans l'obscurité,
elles reflète la lumière,
on reconnaît en elle
la création à tête de Janus.

Enoncé dans la pluie,
écrit dans le livre nocturne -
tache de sang, écriture de pierre,
craie et crayon,
les encres indélébiles de la faute,
le signe dans le sable, le chiffre dans la neige,
mot magique vie; vie,
bientôt assombri par les angoisses de la mort.

Le mot qui nous atteint trop tard,
qui ne nous atteint jamais;
le lieu du cœur enfermé dans les images,
les mots en fleuve; leur reflux
s'Il disait Ce mot-là.

Sons éparpillés, syllabes étranglées,
mots chuchotés par l'herbe et le vent,
familiers aux animaux, ce sont les enfants
qui les imitent, c'est le poète
qui, plus sonore, se tait,
les vestes blanches tuent
d'une parole noire.

A chercher des contre-paroles
celui qui écrit se retrouve à l'écart.

 

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© Le Culturactif Suisse

Page créée le 31.08.03
Dernière mise à jour le 17.09.03

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