Raphael Urweider
Raphael Urweider est assurément l'un des poètes les plus remarquables de sa génération en Suisse alémanique. Il est particulièrement réjouissant de le voir traduire en français : les Editions Empreintes et le jeune traducteur Simon Koch annoncent en effet pour le courant du mois de novembre la parution du recueil Lumières à Menlo Park, paru dans son édition originale allemande ( Lichter in Menlo Park ) chez DuMont, à Cologne, en 2000 . En bonnes feuilles, nous sommes heureux de vous offrir cinq poèmes traduits.
Raphael Urweider est né en 1974. Il a suivi une formation musicale à la Allgemeine Jazz-Schule de Berne et des études de germanistique et de philosophie à Fribourg. il est aujourd'hui auteur-compositeur, musicien et membre du groupe de hip-hop bernois LdeeP. Il a remporté plusieurs prix littéraires en Suisse et en Allemagne. Notre revue Feuxcroisés lui a consacré un dossier approfondi dans sa 7ème livraison (2005).
Cinq poèmes dans la traduction de Simon Koch
comparés aux moutons blancs les bruns sont noirs et
se tiennent humides comme des éponges dans la brume
les moutons blancs sont jaunâtres comparés à la brume
et sont accroupis dans l'herbe qui paraît verte ils ruminent
les enfants des petits paysans ne veulent pas tondre les moutons
ils n'aiment pas la laine humide dans des habits verts d'étoffe
grossière ils traversent des prés qui paraissent fins ils veulent rentrer
à la maison sans les moutons humides dans la brume les moutons
mâchent à nouveau l'herbe humide les enfants des petits paysans
ne veulent pas attraper les moutons par la laine ils veulent
rentrer à la maison mais restent perplexes dans l'herbe légère la brume
entoure les enfants qui paraissent mélancoliques les moutons humides
mangent de l'herbe et lèchent les mains des enfants qui
paraissent chaudes pendant que les petits paysans avec des
ciseaux attendent la laine fraîche les enfants regardent à travers la brume
vers la maison les petits paysans se tiennent dans l'encadrement de la
porte et appellent bruyamment les enfants qui dans une brume qui paraît
silencieuse prennent le chemin de la maison avec des moutons non tondus
***
dans la douceur de l'après-midi les continents
sont allongés l'un près de l'autre comme des vaches
somnolentes les prés des océans sont très bleus
mister magellan dessine dans son journal
secret les continents se prélassent
dans la douceur du soir les cartes marines
de mister magellan sont des silhouettes du bétail
indigène de même que des rêves de la reine
d'espagne dans la douceur de la nuit les
continents se nourrissent aux prés de l'èbe
aux prés du flux mister magellan
esquisse les lignes côtières des vaches
dans la douceur du matin scintillent
les pages encore vierges du journal
de magellan bien plus claires que les rêves
de la reine comme le lait frais des continents
***
monsieur galilée est le grand inventeur du
soleil de la lune et des étoiles d'une volière
s'échappent les pensées répétées des
perroquets monsieur galilée regarde à-travers
son télescope fabulé il observe les oiseaux de nuit
dort le jour en rêve lui viennent des perroquets
couleur d'étoile monsieur galilée astique
les lentilles du télescope avec de la peau de daim
le soir aussi se répètent les palabres
des perroquets il ne les entend pas et
oriente ses pensées d'après les étoiles à quoi bon
des perroquets monsieur galilée nettoie son
regard avec de la peau de daim invente le soleil
la lune et leur suite rêve comme la tête
ailleurs d'oiseaux de nuit il se souhaite
le jour un habit de plumes couleur d'étoile
***
les pensées de léonard planent le cur
battant pliées en avion de papier vers
une fresque qui n'est pas encore signor da vinci
s'est restauré le repas il le paie avec du papier
qui fait comme les oiseaux le patron
applaudit léonard sourit solvable laisse aller
ses pensées qui se couchent comme un soleil
repu de vinci se lève lentement il essuie le
sourire de son menton la serviette présente
le dessin d'une fresque à l'irruption du
crépuscule le patron débarrasse ses habits
de la bonne cuisine signor da vinci sourit
comme un soleil repus les pensées légères tout
enveloppées de papier de vinci ici remercie servile
pour les applaudissements du patron et poursuit avec la
serviette et l'estomac ensoleillé les pensées couchantes
***
otto nikolaus august exulte plus bruyant que
le deux-temps qui saccade l'ambiance qui
brouille la vue dans son garage de bois ça
pétarade un deux le moteur d'otto mobilise
sans commune mesure monsieur daimler il tape sans
tact du droit contre la porte du garage en bois mais
nikolaus august otto n'a d'oreilles que pour le moteur
il ne détecte aucun daimler devant la porte la production
en masses est le b.a. ba de daimler il flaire un air
épais à-travers les fente du bois le moteur d'otto
a des ratés entre une et deux l'après-midi le cur
d'otto manque deux battements le moteur toussote
mais il ne stoppe pas otto joint ses mains
il loue son travail daimler se grise dehors
au son du moteur otto le garage pétarade et fume
le deux-temps d'otto est à présent de bon ton
Raphaël Urweider
Traduction Simon Koch
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