Un film de Francis Reusser
"Guerre dans le Haut-Pays" ou "L'Amour en guerre"

Un film de Francis Reusser

adapté de l'oeuvre de Charles Ferdinand Ramuz .
Une production de CAB PRODUCTIONS SA - LAUSANNE

CAB PRODUCTIONS SA
Jean-Louis Porchet et Gérard Ruey
Contact: Florence Ruffetta
Rue du Port-Franc 17,
CH- Lausanne Tél. 41-21/321 15.01 Fax 41-21/321 15 09

sur une idée et avec le soutien de Pierre Starobinski
président de l'Association pour le projet cinématographique
"Guerre dans le Haut-Pays" ou "L'Amour en guerre"

Francis Reusser signe sans doute un de ses meilleurs films et un grand film du cinéma suisse .

La lecture réveille immanquablement des paysages intérieurs. La découverte du texte de C-F Ramuz "Guerre dans le Haut-Pays" fut pour moi une révélation. D'abord parce qu’on y sent déjà tout ce qui fera le style de Ramuz (le roman est écrit en 1912 au retour de Paris, c'est donc un roman de jeunesse), ensuite parce que ce texte garde une incroyable actualité. S'il s'agit bien de la "révolution vaudoise et de l'amour moderne" on retrouve les grandes questions de ce texte dans notre quotidien de cette fin siècle.

D'emblée, il m'a paru indispensable d'utiliser comme excuse la date du bicentenaire de cette révolution vaudoise (1998) pour dépasser le contexte et offrir au cinéma Suisse l'occasion de mettre en valeur ce très beau texte de Ramuz. Quand les dates peuvent servir la culture et que les raisons sont réunies pour ne pas manquer l'occasion de le faire...

Cinq années de travail auront été nécessaires pour rassembler réalisateur, scénaristes, producteurs et personnes influantes afin de garantir un avenir à ce qui était au départ un rêve : susciter la réalisation d'un long métrage de dimension européenne. Dépasser par l'expression culturelle et artistique la géographie d'un canton et donner à voir une partie de notre patrimoine au plus large public possible.

Le tournage est achevé, le montage est en phase terminale. Francis Reusser signe sans doute un de ses meilleurs films et un grand film du cinéma suisse. A découvrir dès le mois d'octobre dans les salles de cinéma!

Pierre Starobinski

 

Synopsis

Hiver 1797-1798. Les troupes de Napoléon alliées aux Libéraux vaudois, occupent le territoire du Pays de Vaud, et s'activent aux préparatifs militaires qui vont précipiter la chute de Berne et de ses vassaux. La vallée des Ormonts (le Haut-Pays) et sa population sont restées fidèles aux Bernois qui leur ont garanti une relative autonomie politique et un statut fiscal favorable.

L'action du film se déroule durant les six jours qui précèdent la chute de Berne et la victoire franco-vaudoise sur les réfractaires pro-bernois Ormonans du Sépey, de la Forclaz et de Vers-l'Eglise. La communauté paysanne qui vit dans le fond de la vallée est déchirée par les débats en cours qui opposent les tenants du statu quo, plutôt conservateurs, souhaitant maintenir leur style de vie agreste et leur indépendance farouche, et les partisans de la Révolution et des Idées des Lumières, importées de France.

Dans ce combat d'idées, un jeune homme DAVID AVIOLAT, dont le père JOSLAS est un conservateur dur, partisan de la Loi Civile et Religieuse, est amoureux de JULIE BONZON, une jeune fille, née d'un père tolérant et d'une mère restée ancrée dans la tradition paysanne. DAVID, postier, qui fait la navette entre le HAUT pro-bernois et ENTREROCHE, la petite ville du BAS, est soucieux de justice et d'égalité. JULIE, qui vit au village et remplace parfois à l'auberge sa soeur VIRGINIE, préfère la vie à deux au débat d'idées, se préoccupe peu des convictions de son aimé. Le conflit père-fils, s'agissant de DAVID et JOSIAS, la dualité amour-politique s'agissant des deux amants, constituent la trame d'un récit tragique. Il verra le fils, DAVID AVIOLAT, mourir de la main de son père, dans l'ultime bataille victorieusement menée par les Révolutionnaires que DAVID a guidés contournant le village par les cols qu'il connaît. JULIE qui tente de rejoindre son amoureux en pleine guerre, se perd dans la neige et les combats, regagne le village pacifié par les Français, où elle est convaincue de rencontrer DAVID aux côtés des soldats victorieux. Elle ne retrouvera que son cadavre, ramené chez son père JOSIAS par ANSERMOZ, le compagnon d'armes de DAVID, un ancien mercenaire au service du Roi de France, passé du côté des Révolutionnaires par goût de la Justice, lui aussi.

L'lnstituteur du village, DEVENOGE, poète à ses heures et amateur clandestin de Jean-Jacques Rousseau, fête l'arrivée des glorieux fils de la Révolution, tandis que JULIE, incapable d'accepter le malheur qui s'est abattu sur leur couple, s'affaire comme si de rien n'était, préparant le repas dans la maison de JOSIAS AVIOLAT, le père infanticide de DAVID, qui a disparu. Le cadavre du jeune homme est maintenu assis à la table de la cuisine par JEAN LE FOU, l'idiot éclairé du village, sous le regard bouleversé d'ANSERMOZ, qui laisse la jeune fille vaquer à son délire de désespoir.

Bien des années plus tard, la voix d'ANSERMOZ évoque l'immuabilité des choses et des lieux, tandis que la vision de JOSIAS pendu, l'enterrement de DAVID, la main d'une très vieille femme qui continue à cueillir des bouquets de fleurs pour son amoureux, laissent deviner que si la Révolution a passé sans vraiment bouleverser ce petit monde des montagnes, la quête obstinée de Justice et d'Egalité, la volonté d'une femme à forger son destin dans la construction du couple, perpétuent la résistance à la résignation et au règne de la norme sociale.

 

Francis Reusser

Cinéaste

Né à Vevey en 1942. Formation à l'École de Photographie de Vevey et à la Télévision Suisse Romande. Création avec François Albera de la section audiovisuelle de l'École Supérieure des Arts Visuels à Genève. Réalisation de nombreux rnagazines TV.

Courts-métrages

  • 1964 : Antoine et Cléopatre
  • 1974 : Un film en chantier
  • 1978 : Bleu Nuit

Films

  • 1965 : Quatre d'entres elles
    Mention au Festival de Locarno

  • 1967 :Vive la mort
    Cannes Sélection de la Quinzaine des Réalisateurs (irnage: Renato Berta)

  • 1976 : Le grand soir
    Grand Prix du Festival de Locarno Grand Prix du Festival de Hyères (Avec Niels Arestrup, image: Renato Berta)

  • 1981 : Seuls
    Cannes Sélection de la Quinzaine des Réalisateurs (Avec Niels Arestrup, Christine Boisson, Michael Lonsdale, Bulle Ogier, image: Renato Berta)

  • 1984 : Derborence
    Cannes Sélection officielle en compétition César 1985 du meilleur film francophone (Avec Isabelle Otero, Bruno Cremer, Jacques Penot, image: Emmuel Machuel, son: François Musy)

  • 1987 : La loi sauvage
    (Avec Michel Constantin, Hélène Lapiower, Lucas Belvaux, irnage: Emmauel Machuel, son: François Musy)

  • 1991 : Jacques & Françoise
    (Avec Geneviève Pasquier, François Florey, Roland Arnstutz, image: Joel David, son: François Musy)

Documentaires

  • 1971 Biladi une révolution
    Mention au Festival de Locarno

  • 1994 Passages de la Recherche
    Documentaire de création (ARTE, TSR) Sélection au Festival de Tour Eiffel

 

Lettre de Jean-Claude Carrière

Paris, le 4 août 1997

Cher Francis,

J'ai relu attentivement, une fois encore, le livre de Ramuz, et la dernière version du scénario. Je crois que nous approchons enfin, après un an de travail, de ce que nous avons imaginé au tout début: « Un film historique d'aujourd'hui ..

Cela paraît contradictoire, et pourtant. Ce qui me frappe toujours, quand on aborde par le vivant la période révolutionnaire, c'est le tourbillon incessant et la permanente nouveauté des idées qui s'ébranlèrent à ce moment-là, et qui transformèrent le monde.

Tout semble avoir été dit, discuté, éprouvé, rêvé, combattu en quelques années, tout aussi bien la force irrésistible de l'idée nouvelle - une idée jusqu'à en mourir - que la fragilité de ces mêmes lumières, fragilité si clairement sensible partout aujourd'hui en Europe.

Que Ramuz ait choisi de nous présenter ce combat nécessaire et sans fin, cette guerre véritable entre nous et nous, dans un tout petit coin de Suisse, qu'il l'ait fait avec des personnages simples et jeunes, qui en perdent vie et raison, qu'il ait si bien établi le contraste entre le haut et le bas, entre le mouvant et le stable, entre hier et demain, entre Dieu et les hommes, entre l'intégrisme et l'intelligence, tout cela m'a toujours paru donner à ce conflit fondamental une concentration particulière, inoubliable, bien plus efficace que de longues dissertations généralistes.

Qu'en plus l'apport extrêmement graphique du paysage, le fond blanc de la neige, qui semble attendre telle ou telle écriture, la rudesse des visages et des vêtements, notre recherche d'un découpage abrupt, inattendu, qui jamais cependant ne violerait le passé par la présence trop visible d'une caméra, tout cela me paraît très favorable à l'apparition de ce qu'on appelle habituellement le cinéma.

Je vois peu de dangers, ou de réserves. Bien sûr, mais nous le savons, nous devons nous méfier d'un certain mélo, et même d'un kitsch, toujours à portée de l'oeil quand le passé paysan se ramène. Mais bon, nous sommes prévenus. Nous savons bien que c'est la vraie vie, toujours, qui doit l'emporter, d'autant plus vraie qu'elle est naturelle. Nous avons beaucoup réfléchi à tout ce que nous aimerions mettre dans le film, entre la montagne et la plaine, le brouillard et le soleil, la tradition et l'impatience, la clameur et le murmure. Je te fais grande confiance là-dessus.

En toute amitié

Jean-Claude Carrière