Le temps nostalgique
C'est la beauté d'un monde
désappris. Invisible à la lumière du
jour, entrevu certains soirs d'angoisse à travers
les larmes. C'est la sensation jamais apaisée d'une
promesse originelle, non tenue par l'existence. C'est, hélas,
le simulacre du quotidien pour oublier le chagrin. "Certains
pourtant se parlent, mais leurs voix se ressemblent toutes,
et les mots dans leurs bouches font penser à cette
argenterie qu'on sort des armoires à l'occasion d'une
visite." Incapable de se résigner à
l'inévitable trahison de la vie, François
Vassali, écrivain genevois, aspire à la réconciliation
entre "le monde du dehors
et le monde du dedans". Son premier roman, Un
espoir a peut-être vécu ici, est une
tentative pour rectifier les mensonges qui corrompent toute
destinée. Entre tristesse et amertume. Lors d'une
douloureuse confidence. François Vassali, prône
l'éveil des consciences ensommeillées, le
retour à la vérité des premières
années, des premières espérances. "Je
crois que les hommes ont vu quelque chose d'effrayant s'agiter
dans leurs rêves. Oui quelque chose tourmente l'humanité
depuis des siècles mais personne ne veut vraiment
en parler." En quête de ce secret, "l'un
des mieux gardés de toute la création",
de cet autrement de la vie dédaigné dès
l'enfance, peut-être dès la naissance, François
Vassali aborde une littérature de l'inquiétude
qui ne se résout pas à la défaite du
bonheur. Mélancolique et grave, sa prose radieuse
prospère sur la désolation d'un propos aux
intonations parfois prophétiques : "L'immense
somme de silence que nous les hommes nous avons jusqu'ici
retenue prisonnière commence à montrer des
signes de révolte (...). Dans les prochains siècles,
les prochaines années ou les prochains mois, surviendra
forcément un événement très
grave qui nous plongera tous dans un grand désarroi",
écrit-il.
Cet ouvrage, qui nous enseigne à
survivre à nos déceptions, à fuir le
réconfort du mal et de la cruauté, s'impose
comme un avertissement. On l'aura compris : un écrivain
a vécu dans ce livre magnifique.
François Vassali, Un espoir a
peut-être vécu ici, L'Arpenteur, 2002.
Pascal Paillardet
L'Arpenteur
20.08.02
Page créée
le: 23.08.02
Dernière mise à jour le 23.08.02
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