Consigne : écrire son autoportrait,
avec comme référence le début de LAge dhomme
de Michel Leiris.
Peut-être moi
Je viens de vivre mon vingt-cinquième
anniversaire, un quart de siècle. Cest énorme pour
quelquun qui a lhabitude dêtre la cadette.
Jour après jour, je collectionne les signes
du temps qui passe. Mes traits deviennent plus marqués et les
futures rides se devinent sur mon visage. Pourtant jaime lexpression
de ma figure de plus en plus. Je ne mhabitue à mon image
que maintenant. Je commence à me reconnaître en regardant
dans la glace. Jy vois la tristesse que je porte dans mon cur
depuis la plus tendre enfance. Jai toujours été
un personnage triste. Le monde onirique est le mien. Ma vie se déroule
sur deux axes : celui de la réalité tangible, et celui
des rêves, souvent cauchemardesques. Si un mauvais rêve
massaille dans mon sommeil, je ne le fuis pas, jai appris
à les apprivoiser. Le rêve est un lieu de rencontre pour
moi, jy côtoie plein de monde : les êtres proches
comme les personnages lointains et insignifiants dans ma vie.
Daprès les indices physiques, je
suis une femme. Je suis assez petite, brune aux yeux noirs, bridés.
Mes yeux aiment les larmes : elles les purifient. Mon nez est assez
droit et bien dessiné, ce qui fait que je suis plus jolie de
profil que de face. De profil jai un air plus distingué.
Ma bouche est petite, composée de deux fines lèvres souvent
tendues en grimaces. De manière générale, jaime
beaucoup les grimaces, peut-être parce que mon visage cherche
toujours un autre personnage. Jai grandi dans le théâtre
et maintenant je le porte sur moi.
Mon corps se transforme de manière imperceptible
mais certaine. Mon poids néanmoins reste le même. Jai
la taille assez fine et les hanches relativement larges signes
de féminité que jai hérités de ma
mère et particularité que je tenais en aversion durant
toute mon adolescence de garçon manqué. Ma féminité
est très contradictoire : jaime regarder les femmes, je
les trouve sensuelles, mais moi, je ne sais pas si jen fais partie.
A part les grimaces, je souffre dun nombre
considérable de gestes parasites : je me touche sans cesse le
visage et je cache souvent mon nez dans mon écharpe, objet incontournable
de mon costume.
Alors si vous voyez une fille aux yeux perdus,
enfouie jusquaux oreilles dans son foulard, il y a des chances
que cette fille soit moi.
© Paulina Eremina
Page créée le 20.11.01
Dernière mise à jour le 20.06.02