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Editions Samizdat

Denise Mützenberg
8 chemin François-Lehmann - 1218 Grand-Saconnex
Tél. 022 734 05 92
sampoesie@gmail.com
http://www.editionsamizdat.ch


Automne 2003
 

  Gabriel Mützenberg / Poèmes du seuil

Dans la nuit du 2 au 3 janvier 2002, Gabriel Mützenberg entre à l'hôpital en urgence. Son unique rein ne fonctionne plus. Seul le recours à trois dialyses par semaine peut l'arracher à une mort imminente. Mais son organisme est très affaibli. Survivra-t-il? Il souhaite ardemment un sursis pour "finir sa tâche." Neuf mois lui sont accordés. Comme une gestation vers une Autre naissance. Mais qu'est-ce qui, outre sa foi, l'aidera dans cette traversée ?

Le 12 janvier, sa belle-soeur, Claire Krähenbühl, lui fait don d'un petit poème ouvert sur une énigmatique note suspendue. L'inachèvement invite à répondre. Gabriel répond. Puis demande à Claire et Denise d'entre avec lui dans une écriture à trois voix. Pour lui, dit-il, ce sera -il aime ce mot- la "tâche" qui lui permettra de vivre l'épreuve, le sens possible donné à ce temps de mise à l'écart. D'où ce "quatuor", (Denyse Sergy s'y glissera fugitivement) que le retour à la maison, cependant, finira par interrompre.


Retour à la maison, oui. Mais non à la guérison. Gabriel poursuit le chant tout seul, balisant l'inconnu, l'approche inconcevable, de mots qu'il semble arracher à ses "tréfonds".
"Tenir cette note (...) jusqu'au dernier matin" écrivait-il dans son premier poème. Il la tiendra, incroyablement, jusqu'à ce que le crayon s'échappe de sa main. Jusqu'au seuil.
Ce seuil qu'il semble entrevoir dans les textes ultimes, écrits trois nuits avant la fin, d'une bouleversante sérénité, presque gaie.

Denise Mützenberg

Gabriel Mützenberg

Dans la présentation de son recueil de poèmes "Que dit minuit profond" on pouvait lire:

On connaît l'historien, le fouilleur d'archives, le journaliste, le rédacteur de "Certitudes", le pamphlétaire, le témoin hardi, le défenseur des causes perdues, "Don Quichotte des derniers moulins".
On connaît le traducteur, le passeur des langues et des cultures rhéto-romanes, l'auteur de récits et de nouvelles, le conférencier, le guide culturel, le prédicateur. Homme de plume et de parole!
Mais sait-on qu'il a d'abord été poète ? D'abord poète et longtemps poète uniquement ? Poète avant-tout ?

La dernière année de sa vie aura confirmé cette intuition de manière émouvante. Poète d'abord, poète avant-tout et poète jusqu'au bout, oui. Jusqu'à son dernier souffle, le 29 septembre 2002, peu de temps avant minuit.

Gabriel Mützenberg, Poèmes du seuil, Editions Samizdat, 2003

 

  Jean-Marc Denervaud / Quelque part dans l'inachevé

Ainsi persiste le veilleur oublié
Sur ce rivage d'herbe et de silence
Et tu regarderas la mer
Dans l'attente des arbres
Aimer cette lumière encore
Tenir parole...

On croirait lire un poème!
Mais c'est l'énumération des titres des six derniers recueils - il en a publié une douzaine - de Jean-Marc Denervaud. Un art poétique s'en dégage qui dit l'attention extrême, mais aussi la patience obstinée, toutes deux habitées d'une tension jamais relâchée entre silence et parole, parole et silence.
Quelque part dans l'inachevé nous renvoie à ces constantes:
"Au bord de ne rien dire
Je me penche" / "Le silence est resté"

Toutefois, après un long temps marqué par le deuil, la perte, l'absence, Jean-Marc Denervaud semble entrer ici dans un lieu de présence, d'apaisement, de réconciliation, d'offrande même, où se découvre
La simple
étendue
D'exister
Qu'on peut habiter
Comme une tente au désert

Même quand il habite enfin sa vie le poète demeure nomade, En quête. "Quelque part" oui, mais "dans l'inachevé".

Je reste au bord
De l'immensité, écrit-il,
Ouvert sur l'ouvert

Denise Mützenberg

Jean-Marc Denervaud

Né en 1943 à Genève, l'auteur a toujours mené une "double vie": philosophe et poète d'un côté, militant du monde syndical et associatif de l'autre. C'est que, pour lui, la philosophie n'est pas un discours mais un exercice. Celui d'un incessant aller-et-retour entre la pensée et l'action, à la recherche de la "réalisation de soi" avec d'autres et dans un monde plus juste. Et la poésie est une tentative toujours inachevée de rejoindre l'arrière-pays d'où émergent et où retournent toutes ces manifestations de vie.

Jean-Marc Denervaud, Quelque part dans l'inachevé, Editions Samizdat, 2003

 

Page créée le 06.11.03
Dernière mise à jour le 07.11.03

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