Milena Moser
Yoga, meurtres, etc., traduit de l'allemand
par Françoise Toraille, Editions calmann-lévy, 2006, 326
pages
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Milena Moser
dans nos pages consacrées aux auteurs de Suisse.
Milena Moser /
Yoga, meurtres, etc.
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ISBN 2-7021-3671-0
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« Rester assise. Continuer
à respirer. Ce fut sa première idée.
Le yoga, c'est être capable de garder une position
inconfortable. Tout simplement rester assise, continuer
à respirer. [
]
La séance de yoga approchait doucement de sa
fin. Au moment de l'exercice final de relaxation,
Lily pensait toujours au petit déjeuner qui
l'attendait. C'était l'été, elle
était seule. Seule pour tout l'été.
Elle ne faisait pas la cuisine, elle ne se préparait
même pas une tasse de café. Ça
ne valait pas le coup. La seule chose supportable,
c'était la télé. La télé,
et picoler. Le programme d'été de Lily.
Tout ça était nouveau pour elle. Et
maintenant, par-dessus le marché, le yoga.
[
]
Mandalee était allongée dans la posture
du corps mort, étendue sur le dos, bras et
jambes un peu écartés, les yeux fermés.
Shavâsana, ce n'était pas seulement
une posture de relaxation, c'était aussi une
préparation à la mort, ou plus exactement
à l'état de mort. À la fin de
chaque séance, on passait dix minutes, un quart
d'heure, ainsi étendu, et sans penser à
rien. Ou bien en pensant au petit déjeuner.
Il arrivait que l'on s'endorme, ainsi allongé.
Mais Mandalee était morte pour de bon. [
]
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- Miss Winters avait-elle des problèmes cardiaques,
ou bien de l'asthme ? demanda l'un des policiers.
Kath se tourna lentement vers eux.
- À ma connaissance, non, dit-elle en ponctuant ses
paroles d'un mouvement de la tête. '
- Vous n'avez rien noté de particulier ? »
« Les romans de Milena Moser accrochent un sourire
aux lèvres et font voir la vie en rose. [
]
C'est sur l'humanité de ses personnages et l'originalité
des situations burlesques que repose son succès.
[
]
Toutes ensemble, levons-nous pour Milena Moser ! »
Elle
Milena Moser; l'impertinente
de la littérature féminine, est une conteuse
tragi-comique hors pair ; elle navigue avec grâce
sur les montagnes russes de notre époque tout en
cultivant l'art de la provocation. Née en 1963 à
Zurich, elle vit désormais à San Francisco
et est l'auteur de L'ìle des femmes de ménage
(1994), A quoi rêvent les blondes (1995), Mon
père et autres imposteurs (1996), Coeur d'artichaut
(2002) et C'est pas le pied ! (2004), tous publiés
chez Calmann-Lévy.
Yoga, meurtres, etc., traduit
de l'allemand par Françoise Toraille, Editions calmann-lévy,
2006, 326 pages.
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Critique,
par Elisabeth Vust |
" Le métier d'écrivain
ressemble à celui de la femme de ménage qui
à son tour ressemble à celui d'un détective
privé. On se mêle de la vie des gens, réels
ou fictifs, on se met dans leur peau, sous leur peau même,
on vit un peu la vie des autres. Pour moi, il n'y a rien
de plus fascinant que d'essayer de deviner ce qui fait "marcher"
les autres, de deviner comment ils fonctionnent, à
quoi ils rêvent ", disait Milena Moser en 2004
(cf Livre
du mois Feuxcroisés 6). Après avoir vécu
huit ans à San Francisco, la Zurichoise est revenue
cet été avec mari et enfants en Suisse, pour
habiter la maison familiale en Argovie. Dans Yoga, meurtres,
etc., il est moins question de déménagements
que de séjours temporaires, squats de canapés
et de fugues. Les déjà lecteurs de Milena
Moser nageront en eaux familières dans ce récit
haut en couleurs où l'on retrouve les héros
de C'est pas le pied ! (2004). Revoilà donc
San Francisco et Rhonda (conceptrice d'un site internet
destiné à simplifier la vie), Alice (chamboulée
par les tours que son corps lui joue), Frank (devenu guérisseur
après son internement dans une clinique psychiatrique)
et bien sûr Leo et Lily. Stella pour sa part troque
ici ses ailes d'héroïne pour un rôle plus
discret. Pour mémoire, Stella s'est suicidée
il y a une quinzaine d'années - le baby blues avait
accentué ses tendances dépressives-, ce qui
ne l'empêche pas de veiller sur les siens, sur son
fils Léo (14 ans) et la nouvelle mère de son
fils, Lily ; mais peut-être plus sur Frank, son ex-mari,
depuis qu'il a quitté Lily.
Milena Moser ne s'intéresse
pas à la famille dite traditionnelle. Décomposées,
recomposées, ses familles fictives abritent des intrigues
à coups de théâtre multiples. Avec elle,
les femmes ne ressemblent pas à des créatures
de papier glacé : elles n'ont ni les fesses ni les
pensées lisses ; et bien qu'elles repêchent
parfois leur courage dans un verre de sherry et s'encoublent
dans les obstacles du quotidien, elles assurent et assument
nettement plus que ces messieurs, qui se prennent encore
pour Dieu. Cela dit, quelques illusions ont la vie sauve
dans ce joyeux massacre de clichés où le sérieux
cohabite avec le farfelu, un mouchoir à la main.
Car bien qu'il ait le goût de la farce, le drame se
faufile dans tous les récits de la romancière,
qui a simplement l'élégance de ne pas précipiter
le moral de ses lecteurs dans leurs chaussettes. Hôtesse
fort attentionnée, elle se retourne par ailleurs
régulièrement sur le passé de ses personnages
afin de rendre possible la lecture de Yoga, meurtres
etc. sans (ou avant) C'est pas le pied ! Chacun
pourra donc pleinement savourer ce roman bondissant, débordant
d'imagination qui cache un polar. La mort frappe en effet
trois fois à la porte du studio de yoga où
se rend chaque matin Lily (son pyjama lui sert de tenu de
gym). Après ce réveil zen, Lily passe la journée
à siroter des triples expressos au bar à café
du coin ou à picoler devant la télévision.
Depuis le départ de Leo chez ses grands-parents,
cette jeune femme trompe sa solitude comme elle peut. Jusqu'au
jour où un inconnu - son père, le docteur
Wildvogel - débarque chez elle. Cet homme aux poches
pleines de granules homéopathiques et d'essences
de fleurs de ruisseau va s'avérer un sauveur très
attachant. " Il arrive et il prend tout en charge.
Il arrange tout. Il est merveilleux ", commente l'auteur.
Ruth pour sa part - la mère décédée
de Lily - rejoint Stella et le cercle des anges gardiens.
Esprits rationnels, passez votre chemin ! Milena Moser brouille
les frontières entre les genres (romanesques et sexuels).
Elle dynamite avec impertinence les
mythes - Superman et Superwoman n'ont qu'à bien se
tenir -, elle joue à saute-mouton avec les normes,
elle incite chacune à puiser en elle-même la
force de vivre au lieu d'attendre qu'un homme ne la lui
donne. Et elle ne craint pas le paradoxe, en plaçant
le fantasme du père idéal au cur de
Yoga, meurtres, etc. Pour apprécier les fictions
non pas moitié-moitié, mais plutôt quatre
quarts (suspense, sentiments, satire, société)
de la romancière, il faut aimer les excès
et exagérations, la fantaisie et les changements
d'humeur. Ses héros feront-ils le voyage du retour
avec elle ? On peut supposer que son prochain roman se passera
en Suisse (tout comme ses premiers dont le merveilleusement
grinçant L'île des femmes de ménage).
" Il était temps que moi aussi je fasse une
fois un sacrifice pour mon pays, ce sont des choses que
l'on apprend en Amérique. La main sur le cur,
Switzerland forever ", écrit-elle dans une interview
fictive de Renée Zellweger (Passages, revue
culturelle de Pro Helvetia, printemps 2006). Aucun doute,
Milena Moser n'a pas perdu un gramme d'ironie pendant son
séjour californien. Mesdames, rentrez vos géraniums
! Fils de Tell, aux abris !
Elisabeth Vust
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Revue
de presse |
[...]
Ça se passe comme ça chez Milena Moser : c'est
drôle, on rit, et soudain on rit jaune, parce qu'on
se rend compte avec un certain effroi que Milena Moser nous
fait rire de choses absolument dramatiques - la boulimie
maladive d'une adolescente rejetée par son père,
le refus de grands-parents de rendre leur petit-fils à
la fin des vacances, le suicide d'une mère de famille
convaincue que le bonheur de son bébé dépend
de sa disparition à elle.
C'est d'ailleurs le grand malentendu
à propos de miss Moser, 43 ans: à force de
n'avoir vu dans ses livres que des divertissements légers
et glamour, contre-culture de la tradition littéraire
politique et engagée alémanique, on a préféré
esquiver la noirceur désespérée de
ses personnages, femmes ou adolescentes, souvent, comme
pas par hasard.
[...]
Isabelle Falconnier
24.05.06
[...]
FEMINA : Votre roman décode avec beaucoup d'ironie
le monde du yoga et ses petits travers, si humains... Les
coucheries des maîtres yogis, les plus ascètes
qui s'envoient des viennoiseries à la première
contrariété. Et moi qui croyais que vous étiez
une adepte, vous-même, des studios de yoga !
MILENA MOSER : Comme je suis vraiment
très proche de mon premier professeur de yoga, Alice
Joanou - qui a, de loin, servi de modèle pour Kath
- je porte un regard d'initiée sur le milieu. Sur
l'actuel univers du yoga. Et j'y vois beaucoup de choses
irritantes ou ridicules. Mais je suis pleine de respect
et d'amour pour l'essence du yoga.
Renata Libal
04.06.06
Ses romans acidulés en avaient
fait une star alémanique des années 90. Installée
aux Etats-Unis, Milena Moser poursuit sur sa lancée.
Ce livre constitue la suite de C'est pas le pied. Lily la
Zurichoise est installée à San Francisco.
Elle participe à une enquête mollachue dans
un studio de yoga. L'essentiel reste la description du "cauchemar
américain". On s'ennuie un brin. Calmann-Lévy,
327 pages.
(ed)
30.6.2006
[
] Comme souvent chez
Milena Moser, tout a l'air loufoque et léger. Il
est vrai que les personnages sont gratinés: l'ex-mari
devenu guérisseur, le père qui réapparaît
après quinze ans de silence avec l'urne funéraire
de sa femme sous le bras, le détective privé
qui pratique l'amour à la va-vite, sans oublier quelques
fantômes avec lesquels les vivants communiquent le
plus naturellement du monde... Mais les romans de Milena
Moser ne sont pas que "distrayants"; ils recèlent
une véritable noirceur. Un gosse rêve d'une
famille normale, une ado boulimique veut changer d'identité...
Entre intrigue policière et thérapie familiale,
"Yoga, meurtres, etc." fait rire, mais d'un rire
jaune. C'est pour ça (aussi) qu'on aime Milena Moser.
Manuela Giroud
23.06.2006
En 1994, une grande brunette bien
trop jolie pour être sérieuse débarquait
au pays de Frisch et de Dürrenmatt avec L'île
des femmes de ménage, un petit bijou de fantaisie
et de cruauté racontant la vengeance d'Irma, femme
de ménage surdiplômée, au service d'une
superwoman aussi brillante qu'énervante. Quatre romans
et autant de succès plus tard, elle est devenue l'égérie
d'une littérature tragi-comique qui marie histoires
de bonnes femmes, féminisme joyeux et satire grinçante
de la société. Qu'elle soit zurichoise ou
californienne, puisqu'il y a huit ans, sur un coup de coeur,
Milena Moser s'est installée avec enfants et mari
à San Francisco, plongeant du coup ses héros
jusque-là suisses dans l'atmosphère néohippie
et multiculturelle des bords du Pacifique. Sur le point
de regagner la Suisse et de s'établir à Möriken-Wildegg,
le village d'enfance argovien de son mari le photographe
Thomas Kern, elle ne s'est pas fait tatouer sur l'épaule
le skyline de San Francisco comme son fils Lino, 18 ans,
mais ramènera dans ses valises la saine habitude
d'être simply friendly. "Même si, en Suisse,
ça me vaudra sûrement d'être prise pour
une folle". [
]
Isabelle Falconnier
8.6.2006
Page créée le: 04.07.06
Dernière mise à jour le: 11.07.06
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