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français
Mikhaïl Chichkine
/ Dans les pas de Byron et Tolstoï
Du lac Léman à
l'Oberland bernois
traduit de l'allemand
par Colette Kowalski
Il n'y a assurément
aucun pays, aucune partie de notre terre qui soit à
tant d'égards aussi remarquable et intéressante
que la Suisse. L'homme et le philosophe au sens le plus
large de ces termes ne trouveront nulle part ailleurs tant
de matière à étude, à observations
et tant de pur plaisir de vivre.
Johann Gottfried Ebel,
Pour qui la Suisse est-elle remarquable ?
Début du voyage
Il y a des noms qui
ont par paires : Goethe et Schiller, Frisch et Dürrenmatt,
Nietzsche et Dostoïevski... Et il y a des noms qui,
dans l'histoire, dans la littérature, dans la conscience
quotidienne, ne se rencontrent jamais, par exemple Byron
et Tolstoï. Ou bien Nietzsche et Herzen. Goethe et
Klee.
Il en va autrement en Suisse. Destins et livres, pensées
et mondes s'y sont croisés par les voies les plus
étranges.
Qu'est-ce qui pourrait bien lier Byron, le romantique démoniaque,
et Tolstoï, le sage ? Tous deux avaient vingt-huit
ans quand ils arrivèrent au lac Léman. Et
tous deux partirent en montagne, parcourant exactement le
même itinéraire, de Montreux au Simmental par
le col de Jaman, de là vers Interlaken et Grindelwald.
Ils laissèrent leur regard errer sur les mêmes
sommets, marchèrent peut-être sur les mêmes
pierres, dormirent sans doute dans les mêmes maisons,
se reposèrent à l'ombre des mêmes arbres.
Et tous deux écrivirent un journal dont les notes,
plus tard, passèrent directement dans leurs textes.
C'est cela qui présente un intérêt particulier
: non pas fouiller dans l'oeuvre complète, élaborée
avec soin, mais regarder par-dessus leur épaule,
mettre ses pas dans les leurs, contempler leurs montagnes,
trouver à travers des mots et des pierres des points
de contact avec eux et avec bien d'autres encore qui, par
leurs textes, leur pinceau, leur musique, ont vaincu la
mort.
Cela fait déjà un certain temps que je me
prépare à ce voyage : j'ai feuilleté
les lettres et les journaux les plus divers, cherché
dans d'anciens ouvrages des indications sur ce que pouvait
être un périple en montagne cent cinquante
ans plus tôt. Je voulais m'approcher d'eux, tout faire
comme eux, fidèlement, même s'il ne s'agissait
que de bagatelles ; par exemple je voulus apprendre comment
on s'habillait à l'époque, ce qu'on emportait
avec soi. Dans le vieux Guide de poche à l'usage
des voyageurs dans l'Oberland bernois, j'ai trouvé
d'utiles conseils : double voile vert pour se couvrir le
visage lors de la traversée des champs de neige ou
des glaciers au soleil ; des bretelles blanches de poil
de chèvre (et non de cuir) ; des gants solides, montant
haut, en grosse toile grise ou en nankin ; des chemises
à petits boutons de nacre sur la poitrine et au col
pour ne pas être brûlé par le soleil
; une canne solide, assez longue, sans noeuds et avec un
bout ferré; un collet ou un petit manteau de taffetas
ciré pour se protéger de la pluie ; une gourde
remplie de kirsch ou de vinaigre de framboise ; une demi-livre
de sucre et de thé ; des épingles et aiguilles
à coudre avec du fil blanc et noir ; de la ficelle
un peu forte ; un peigne ; un rasoir ; un petit miroir dans
le portefeuille ; un encrier de corne avec une pointe ;
deux morceaux de bougie pour pouvoir visiter les grottes
; enfin quelques centaines de crampons à chaussures."
Je voulais voyager comme ils l'avaient fait autrefois, mais
il apparut que je n'avais rien de tout cela : je ne possédais
ni bretelles de poil de chèvre ni petit manteau de
taffetas ciré, sans parler des centaines de crampons
à chaussures. En revanche, j'ai emporté mon
ordinateur où je suis en train de saisir la préface
à mon livre de voyage, auquel on a fait un mauvais
pronostic : pourquoi un de plus, il y en a déjà
des dizaines ! Je ne sus que répondre à cela,
et je ne le sais toujours pas.
Le train qui m'amène au lac Léman vient juste
de s'engouffrer dans un tunnel. La dame d'un certain âge
assise en face, à la fenêtre, et qui parlait
avec animation dans son téléphone portable,
peste parce que la communication a été interrompue.
Quand, de Paris, Tolstoï partit pour Genève,
il écrivit à Tourgueniev, son ami écrivain
: "J'ai fait excellemment de quitter cette Sodome.
Pour l'amour de Dieu, allez-vous-en aussi quelque part,
mais point avec le chemin de fer. Le chemin de fer est au
voyage ce que le bordel est à l'amour. Il est tout
aussi commode, mais tout aussi inhumainement mécanique
et monotone à mourir."
Le train réduit sa vitesse, il travers le tunnel
très lentement, c'est à peine s'il avance.
A la lumière des lampes, les gouttes étincellent
contre les vitres. Cela fait longtemps que j'ai programmé
mon voyage pour ces jours de septembre ; visiblement, la
pluie a fait de même. On verra jusqu'à quel
point elle s'entête. Moi, je ne céderai pas.
Nous sortons du tunnel dans un bruit de ferraille ; un mur
peint de graffitis défile ; entre les orgies de calligraphie
multicolore, un simple "Albanais dehors !" accroche
l'oeil.
Peut-être les
récits de voyage me fascinent-ils déjà
parce qu'il n'en existe pour ainsi dire pas en Russie. Ici,
toutes les librairies ont un rayon qui leur est réservé.
Dans mon pays, le phénomène historico-culturel
du voyage à pied pour jouir des paysages et se détendre
est également inconnu. Il est possible que cela vienne
de ce que, là-bas, quand on se déplace à
pied (ou quand on voyage, car, comme disait Gogol, on y
peut rouler en voiture pendant trois ans sans arriver nulle
part), même si on s'écarte de vingt ou trente
kilomètres à droite ou à gauche, cela
ne fait aucune différence, la vue ne change pas,
le paysage reste le même, la forêt, le ciel,
sont immuables. Et au bout de cent ou deux cents kilomètres,
c'est toujours la même chose.
Le premier livre du genre écrit en russe sur le modèle
occidental est dû à l'écrivain et historien
Nicolas Karamzine. Il est vrai que, dans ses Lettres
d'un voyageur russe, il s'agit d'une pérégrination
à travers l'Europe occidentale, mais il parle également
de son excursion dans les montagnes de l'Oberland bernois
en 1789. A cette époque, il n'avait pas plus de vingt
ans et inspirait, avec le zèle d'un élève
avide de savoir, l'air culturel de l'Europe de l'Ouest.
Le dernier cri, quand on partait dans les Alpes, était
d'emporter dans son sac à dos les Lettres de deux
amants habitants d'une petite ville au pied des Alpes
(qui sont en fait le tout premier livre de voyage) de Rousseau.
Le roman d'amour passionné, publié en 1761,
fit éclater la vieille conception du monde. Julie
ou la Nouvelle Héloïse est sans doute un
des livres les plus révolutionnaires de l'humanité
; avec lui a grandi la génération de ceux
qui, en France, ont été les acteurs de la
Révolution. Il fit des montagnes, où l'homme
n'existe pas avec sa culture malade, qu'il retourne contre
lui-même, où rien n'est perturbé par
la civilisation, un objet de culte. Elles se revêtirent
d'une nouvelle fonction : celle d'un rempart protégeant
l'harmonie, de murailles entourant la nature et la simplicité
originelles, une très ancienne béatitude dansl
'état de nature que rien encore n'est venu détruire
La vieille religion s'était épuisée,
une nouvelle croyance naquit, ou une nouvelle hérésie,
selon ce qu'on veut y voir. Rousseau écrivit Rêveries
du promeneur solitaire. Et nous avons là un des mots
clés du nouveau culte : le promeneur solitaire, indépendant,
sensible, exalté.
C'était une religion pour intellectuels, pour philosophes.
Tirés de leur cabinet de travail et placé
dans la nature, ils perdaient leurs quatre murs habituels,
qui s'élargissaient et accueillaient tout : les montagnes
devenaient des bibliothèques, les nuages des livres,
la prairie le siège. On attribua à la nature
un autre rôle, on chercha en elle le reflet de ses
sentiments, elle devint la métaphore de l'âme
humaine.
Le livre de Karamzine suscita en Russie un véritable
culte. Ses adeptes ne partaient plus en promenade avec Rousseau,
ils emportaient un livre de Karamzine, mais toujours dans
les Alpes. On ne pouvait tirer aucune jouissance culturelle
des grandes étendues russes, cheminer à travers
de vastes plaines et des forêts sans fin était
vu comme un signe infaillible de pauvreté. De la
même façon, à l'Ouest, déplacements,
pèlerinages, voyages, évoquaient jusqu'au
XVIIe siècle, malencontre, malheur et danger.
On ne se rendait guère de son plein gré dans
des contrées lointaines : soit on y était
contraint par la guerre ou par le bannissement, soit l'activité
commerciale, pleine de risques et de périls, l'exigeait
(le mot anglais travel vient de "travail").
Avec l'amélioration des routes, la construction de
nouveaux véhicules plus confortables et d'hôtels
chic, les mesures de protection plus efficaces contre les
brigands et les agressions, bref, avec la nouvelle infrastructure,
voyager était devenu agréable et peu à
peu s'était développée une sorte de
tourisme qui était le privilège des riches.
En Russie, on continuait à ne voir que les fatigues
et les difficultés des longs trajets à pied.
On se déplaçait en coche ou par bateau et
pour l'agrément, alors que le pauvre peuple était
obligé de s'user les jambes, faute de pouvoir se
payer autre chose. Seuls les gens fortunés appréciaient
la marche, et s'offraient ce plaisir en Europe, dans les
Alpes.
Sans doute la chasse est-elle en Russie l'équivalent
de ce qu'est, en Europe occidentale, la randonnée
ou le voyage à pied qui permettait à l'intellectuel
assuré de son pain quotidien de se promener dans
la nature, et de s'adonner à des pensées philosophiques.
On n'aurait pas tort de considérer que la première
relation de voyage pédestre fut Les Carnets d'un
chasseur de Tourgeniev. l'écrivain, armé
d'un fusil, vagabondait dans les forêts et décrivait
la beauté de la nature, mais ses tableaux montraient
forcément l'horreur du servage. C'est manifestement
une maladie dont la littérature russe souffre depuis
sa naissance : ne pas parler de ce qu'on attend.
De l'écrivain marcher, on attendait qu'il fût
en harmonie avec la nature, mais il produisit un livre qui
disait son désaccord avec le monde. Ou le désaccord
du monde avec lui.
Derrière la vitre,
le lac Léman brille déjà depuis un
moment sous les rayons du soleil qui percent les nuages
. "Mesdames et Messieurs, nous arrivons à
Lausanne"." Je vais prendre maintenant la
correspondance pour Montreux où j'endosserai ma tenue
de marcheur.
Mikhail Chichkine, Dans
les pas de Byron et Tolstoï : Du lac Léman à
l'Oberland bernois, traduit par Colette Kowalski,
avec les photos de Yvonne Böhler, Noir sur Blanc, 2005.
deutsch
Michail Schischkin
/ Montreux Auf den Spuren von Byron und Tolstoj: Missolunghi
Eine literarische Wanderung
vom Genfersee ins Berner Oberland Astapowo
"Es gibt zuverlässig
kein Land, keinen Theil unsers Erdbodens, der in so vielen
Rücksichten merkwürdig und interessant wäre
als die Schweiz. Der Mensch und der Philosoph in dem weitesten
Sinn dieser Wörter, finden nirgends so viel Reichthum
des Stoffes zu Untersuchungen, zu Beobachtungen und zu reinem
Lebensgenuss als hier."
Johann Gottfried Ebel, Für
wen ist die Schweiz merkwürdig? (1793)
Anreise
Es gibt Namen, die sich reimen: Goethe
und Schiller, Frisch und Dürrenmatt, Nietzsche und
Dostojewskij
Und es gibt Namen, die in der Geschichte,
in der Literatur, im alltäglichen Bewusstsein keinerlei
Berührungspunkte aufweisen, zum Beispiel Byron und
Tolstoj. Oder Nietzsche und Herzen. Goethe und Klee.
Anders in der Schweiz. Hier haben sich auf den seltsamsten
Wegen Schicksale und Bücher, Gedanken und Welten gekreuzt.
Was könnte also den dämonischen Romantiker Byron
und den großen Lehrmeister Tolstoj verbinden? Beide
waren sie 28 Jahre alt, als sie an den Genfersee kamen.
Und beide gingen sie in die Berge wandern, liefen die genau
gleiche Strecke von Montreux über den Col de Jaman
ins Simmental, von dort nach Interlaken und Grindelwald.
Sie ließen ihren Blick über dieselben Berggipfel
schweifen, traten vielleicht auf dieselben Steine, übernachteten
vermutlich in denselben Häusern, ruhten sich im Schatten
derselben Bäume aus. Und beide schrieben ein Tagebuch,
von deren Eintragungen ein direkter Weg zu ihren späteren
Texten führt.
Genau das hat seinen besonderen Reiz: Nicht in ihrem mit
Bedacht ausgearbeiteten gesammelten Werk zu stöbern,
sondern ihnen über die Schulter zu blicken, ihre Fußstapfen
nachzuvollziehen, ihre Berge anzuschauen, durch Wörter
und Steine Berührungspunkte mit ihnen und noch mit
vielen anderen mehr zu finden, die durch ihre Texte, ihre
Pinsel, ihre Noten den Tod besiegt haben.
Es ist schon eine Weile her, dass ich mich auf diese Wanderung
vorbereitet habe: Ich habe in den verschiedensten Briefen
und Tagebüchern gewühlt, Zitate gesammelt, in
alten Büchern nach Hinweisen darauf geforscht, wie
eine Bergwanderung vor hundertfünfzig Jahren wohl verlaufen
sein mag. Ich wollte mich ihnen nähern, es ihnen getreu
in allem gleichtun, sogar wo es nur um Bagatellen geht,
wollte zum Beispiel erfahren, was man damals anzog, was
man mitnahm. In einem alten Reiseführer, dem so genannten
Taschenbuch für Reisende im Berner Oberland (Aarau,
1829), fand ich folgende nützliche Ratschläge:
"Der Fußreisende braucht einen Hut mit breitem
Rande; einen grünen Doppelflor, um sich damit, beim
Überwandern der Schneefelder oder Gletscher im Sonnenschein,
das Gesicht zu bedecken; weiße Hosenträger von
Ziegenhaar (ja nicht von Leder); weit hinaufreichende, starke
Handschuhe von roher grauer Leinwand oder Nanking; Hemden
mit kleinen Perlmutterknöpfen auf der Brust und am
Halse, um nicht von der Sonne verbrannt zu werden; einen
starken, ziemlich langen Stock, ohne Knoten und mit einer
Stahlspitze; einen Kragen oder kleinen Mantel von Wachstaffent,
um sich gegen den Regen zu schützen; eine Korbflasche,
mit Kirschwasser oder Himbeeressig angefüllt; 1/2 Pfund
Zucker und Tee; Steck- und Nähnadeln; weißen
und schwarzen Zwirn; etwas starken Bindfaden; einen Kamm;
ein Rasiermesser; einen kleinen Spiegel in der Brieftasche;
ein hörnernes Tintenfass mit einem Stachel; zwei Enden
Wachslicht, um die Grotten besuchen zu können; endlich
ein paar hundert Schuhnägel."
Ich hatte so wandern gehen wollen, wie sie es damals taten,
aber es stellte sich heraus, dass ich nichts von alledem
habe, ich besitze weder Hosenträger aus Ziegenhaar
noch einen kleinen Mantel aus Wachstaffent, geschweige denn
ein paar hundert Schuhnägel. Dafür habe ich mein
Notebook mitgenommen, in das ich gerade jetzt das Vorwort
zu meinem Wanderbuch tippe, dem man eine schlechte Prognose
gestellt hat: Wozu noch eins, es gibt doch schon Dutzende!
Ich wusste nicht so recht, was ich darauf erwidern sollte,
bin auch jetzt noch um eine Antwort verlegen.
Der Zug, der mich zum Genfersee bringt, ist gerade wieder
in einen Tunnel gerast. Die ältere Dame, die am gegenüberliegenden
Fenster sitzt und angeregt mit jemandem per Handy gesprochen
hat, flucht jetzt, da die Verbindung unterbrochen worden
ist.
Als Tolstoj mit der Eisenbahn von Paris nach Genf reiste,
schrieb er seinem Dichterfreund Turgenjew: "Das habe
ich ausgezeichnet gemacht, dass ich dieses Sodom verlassen
habe. Fahren auch Sie um Gottes Willen irgendwohin fort,
aber bloß nicht mit der Eisenbahn. Für eine Reise
ist die Eisenbahn, was für die Liebe das Bordell ist:
Sie ist genauso bequem, aber auch genauso unmenschlich maschinell
und tödlich eintönig."
Der Zug verringert die Geschwindigkeit, ganz langsam fährt
er durch den Tunnel, kriecht beinahe. Im Licht der Lampen
schimmern die Tropfen auf den Scheiben. Diese Septembertage
habe ich schon seit langem für die Wanderung eingeplant,
offenbar hat der Regen das gleiche getan. Ich gebe nicht
klein bei. Nun denn, mal schauen, wie hartnäckig der
Regen ist.
Der Zug rattert aus dem Tunnel heraus, eine mit Graffiti
bemalte Wand zieht vorbei, zwischen kalligrafischen Farbenorgien
sticht ein schlichtes "Albaner raus!" hervor.
Mich fasziniert vielleicht das Genre
Wanderbuch allein schon deshalb, weil es in Russland, im
Gegensatz zum Westen, eigentlich kaum vorkommt. In jeder
Buchhandlung hier gibt es eine eigens für solche Bücher
bestimmte Ecke. Auch das kulturhistorische Phänomen
des Wanderns, dieses Zu-Fuß-Unterwegsseins, um sich
wieder und wieder an den Aussichten zu erfreuen und zu erholen,
ist in meiner Heimat unbekannt. Vielleicht rührt das
daher, dass, wenn man in Russland irgendwohin geht (oder
besser reist, denn da kann man, wie Gogol sagte, drei Jahre
lang mit der Kutsche fahren und kommt doch nirgends an),
es keinen Unterschied macht, ob man zwanzig oder dreißig
Kilometer nach rechts oder links abbiegt, die Aussicht ändert
sich nicht, die Landschaft bleibt sich die gleiche, der
Wald, der Himmel ist der gleiche. Und auch nach hundert
oder zweihundert Kilometern hat sich nichts geändert.
Das erste in Russisch verfasste Wanderbuch nach westlichem
Muster stammt vom Schriftsteller und Historiker Nikolaj
Karamsin, bei seinen "Briefen eines russischen Reisenden"
handelt es sich allerdings um die Beschreibung seiner Reise
durch Westeuropa, darunter auch die seiner Bergwanderung
im Berner Oberland im Jahre 1789. Er zählte damals
nicht mehr als zwanzig Jahre und sog mit dem Eifer eines
wissbegierigen Schülers die kulturelle Luft Westeuropas
ein. Damals waren Wanderungen in die Alpen mit Rousseaus
Lettres de deux amants habitants d'une petite ville au pied
des Alpes (Briefe zweier Liebenden aus einer kleinen Stadt
am Fuße der Alpen) im Rucksack (das ja im Grunde das
erste Wanderbuch ist) gerade der letzte Schrei.
Rousseaus leidenschaftlicher Liebesroman, der 1761 erschienen
war, brach die alte, verkrustete Weltanschauung auf. Seine
Julie ou la Nouvelle Héloïse (Julie oder die
neue Heloise) ist wohl eines der revolutionärsten Bücher
der Menschheit, mit dem die Generation derer, die in Frankreich
die Revolution durchführten, groß geworden war.
Mit diesem Buch wurden die Berge, wo es den Menschen mit
seiner kranken, gegen ihn selbst gerichteten Kultur nicht
gibt, ja wo keine Zivilisation stört, zu einem Objekt
der Anbetung. Sie erhielten eine neue Funktion: Sie wurden
zum Schutzwall für Harmonie, zu Mauern, um die ursprüngliche
Natur und Einfalt zu schützen, eine urtümliche,
noch durch nichts zerstörte Glückseligkeit des
Naturzustands.
Die alte Religion hatte sich erschöpft, ein neuer Glaube
wurde geschaffen, oder auch eine neue Häresie, je nachdem,
wie man es sehen möchte. Rousseau schrieb seine Les
rêveries du promeneur solitaire (Träumereien
des einsamen Spaziergängers). Und damit haben wir eines
der Schlüsselwörter des neuen Kults: der einsame
Wanderer, "le promeneur solitaire", er ist einsam,
unabhängig, empfindsam, schwärmerisch.
Es war eine Religion für die Intellektuellen, für
die Philosophen. Der Philosoph wurde aus dem Arbeitszimmer
hinaus in die Natur versetzt, er verlor seine gewohnten
vier Wände um sich herum, sein Arbeitszimmer weitete
sich aus und nahm alles auf: Berge wurden zu Bücherregalen,
Wolken zu Büchern, die Wiese zum Stuhl. Der Natur wurde
eine andere Rolle zugeteilt, man suchte in ihr Spiegelungen
des eigenen Gemütszustands, sie wurde zur Metapher
für die menschliche Seele.
Karamsins Buch rief in Russland einen regelrechten Kult
hervor. Seine Nacheiferer brachen nun nicht mehr mit einem
Band Rousseau, sondern mit einem von Karamsin zum Wandern
auf, allerdings auch sie in die Alpen. Den russischen Weiten
konnte man keinen kulturellen Genuss abgewinnen, sich zu
Fuß über russische Ebenen und durch endlose Wälder
zu schleppen, empfand man als ein unfehlbares Merkmal von
Armut. Ebenso hatten auch im Westen Fortbewegung, Pilgerschaft,
Reisen bis ins 18. Jahrhundert hinein den Beigeschmack von
Unglück, Bösem, Gefahr. Kaum je hatte man sich
aus freien Stücken in ferne Gegenden begeben, entweder
zwangen Krieg oder Verbannung dazu, oder die risiko- und
gefahrenreiche Kaufmannstätigkeit verlangte danach
(so stammt das englische Wort "travel" von "travail"
ab, von "Arbeit"). Mit der Verbesserung der Straßen,
dem Bau neuer, bequemerer Kutschen und schicker Hotels,
den besseren Schutzvorkehrungen gegen Räuber und Überfälle,
kurz: mit der neuen Reiseinfrastruktur war Reisen angenehm
geworden, es hatte sich allmählich eine Art Tourismus
entwickelt, der zu einem Privileg der Reichen geworden war.
In Russland sah man nach wie vor nur die Mühsal und
das Beschwerliche, wenn man lange Strecken zu Fuß
zurückzulegen hatte. Man reiste in Kutschen und per
Schiff und zum Vergnügen, während der arme Pöbel
seine Beine schinden musste, da er es sich nicht anders
leisten konnte. Nur die Begüterten konnten das Wandern
genießen, und diesen Spaß gönnte man sich
in Europa, in den Alpen.
Vermutlich ist die Jagd das russische Äquivalent zum
westeuropäischen Wandern, bei dem ein freier Intellektueller,
unbelastet von Sorgen um das tägliche Stück Brot,
in der Natur herumspaziert und sich philosophischen Gedanken
hingibt. Richtigerweise müsste man sagen, dass das
erste russische Wanderbuch Turgenjews Aufzeichnungen eines
Jägers waren. Der Schriftsteller streifte mit dem Gewehr
durch russische Wälder und beschrieb die Schönheit
der Natur, doch diese Bilder gingen zwangsläufig in
ungeheuerliche Schilderungen der russischen Leibeigenschaft
über. Offenbar ist das eine Krankheit, an der die russische
Literatur seit ihrer Geburt leidet: nicht über das
zu schreiben, was erwartet wird.
Von dem wandernden Schriftsteller erwartete man, dass er
im Einklang mit der Natur stünde, aber was herauskam,
war ein Buch darüber, dass er mit der Welt quer lag.
Oder die Welt mit ihm.
Hinter der Scheibe leuchtet schon
eine Weile der Lac Léman in den durch die Wolken
hindurchbrechenden Sonnenstrahlen auf. "Mesdames et
Messieurs, nous arrivons à Lausanne. Liebe Fahrgäste,
unser Zug wird in wenigen Minuten in Lausanne eintreffen."
Ich werde jetzt nach Montreux umsteigen und mich dort in
einen Wanderer verwandeln.
Montreux-Les Avants-Col de
Jaman-Montbovon
Erster Tag
Tolstoj wanderte von Montreux aus
hinauf nach Les Avants.
Mein Weg beginnt beim Bahnhof und bringt mich durch die
Vieille Ville zu den Gorges du Chauderon. Die Schilder mit
der Aufschrift Sentier culturel des Alpes weisen mir diensteifrig
die Richtung nach Les Avants. Nur wenige Schritte hinter
den Häusern der Altstadt gerate ich in eine wilde,
gewundene Schlucht, durch die ein hoch über dem Abgrund
gelegener, schmaler Pfad führt. Den Lärm der Autobahn,
die sich hoch in die Lüfte schwingt (die Brücke
über die Schlucht verliert sich irgendwo unter den
Wolken) habe ich weit hinter mir gelassen, nun genieße
ich die Einsamkeit und die Wasserfälle und spüre,
wie ich mich in einen erhabenen Naturzustand nach rousseauscher
Manier zurückbegebe. Pflichtbewusste Drahtseile schützen
mich beflissen davor, nicht in den winzigen, tief unter
mir tosenden Fluss zu fallen - nun gut, so will ich mich
denn den Früchten der Zivilisation nicht abgeneigt
zeigen, damit ich so die wilde Natur besser genießen
kann.
Es regnet nicht, manchmal blinzelt die Sonne sogar durch
die grauen Schleier hindurch, dann treten auf dem rauen
Fell des Waldes blinkende Lichtflecken hervor und huschen
wie in einem Muskelspiel umher.
Plötzlich befällt mich die schreckliche Ahnung,
dass Tolstoj einen ganz anderen Weg nach Les Avants gegangen
sein muss. Mit keinem Wort erwähnt er nämlich
diese Schlucht. Und wer hat denn behauptet, dass es damals
in der Mitte des 19. Jahrhunderts hier bereits einen Wanderweg
gab? Die Tafel Sentier culturel des Alpes hat mir einen
bösen Streich gespielt. Ich gehe offenbar meinen eigenen
Kulturweg. Nicht ganz ohne Bedauern verlasse ich die Gorges
du Chauderon und kehre in die Stadt zurück.
Meine eben erst begonnene Wanderung führt mich demnach
geradewegs ins nächste Stadtcafé, hier möchte
ich meinen Frust in einem Glas Bier ertränken.
Was mögen Tolstojs Beweggründe gewesen sein, im
Frühjahr 1857 während seiner Westeuropareise in
die Schweiz zu kommen? Ursprünglich hatte er gar keinen
Abstecher in die Alpenrepublik vorgesehen. Dass er seine
Absichten änderte und Hals über Kopf von Paris
nach Genf stürzte, glich so ziemlich einer Flucht.
Am Anfang seiner Schweizer Reise war ein Tod. Oder genauer
gesagt, eine Hinrichtung. Alles begann mit der Guillotine.
Als Tolstoj in die Schweiz kam, steckte er in einer tiefen
Krise, danach vollzog sich in seinem Leben eine entscheidende
Wendung. Anlass war ein müßiger Spaziergang,
zusammen mit anderen Pariser Schaulustigen war Tolstoj am
Morgen des 6. April 1857 zu dem Platz gegangen, wo einem
gewissen François Richeux der Kopf abgehauen werden
sollte, da ein Geschworenengericht ihn wegen eines Doppelmordes
zwecks Diebstahls zum Tode verurteilt hatte.
An diesem Tag schrieb Tolstoj seinem Freund W.P. Botkin
einen Brief: "Ich sah der Schrecken genug, sowohl während
des Krieges als auch im Kaukasus; aber wenn ein Mann vor
meinen Augen in Stücke gerissen worden wäre, so
wäre das weniger entsetzlich gewesen als diese ausgeklügelte
und elegante Maschine, mit welcher ein starker, lebensvoller
und gesunder Mann in einer Sekunde getötet wurde. Im
Krieg herrscht ein unvernünftiges, doch menschliches
Gefühl der Leidenschaft, hier hingegen eine hochverfeinerte
Ruhe und Bequemlichkeit beim Töten und nichts Erhabenes
mehr. Allein der freche, anmaßende Wunsch, Gerechtigkeit
auszuüben, Vollstrecker des Gesetzes Gottes zu sein.
Eine Gerechtigkeit, über die die Advokaten entscheiden,
von denen doch ein jeder, sich auf Ehre, Religion und Wahrheit
berufend, etwas anderes sagt. Mit derselben Formalität
haben sie den König getötet und Chénier
und die Republikaner und die Aristokraten und den Herrn
(ich habe vergessen, wie er heißt), dessen Unschuld
am Mord, weswegen er hingerichtet worden war, vor zwei Jahren
erwiesen wurde. Und die Menschenmenge ist abstoßend,
der Vater, der die Tochter nach vorn schubst, mit welch
kunstfertigem, bequemem Mechanismus es doch erledigt wird,
u.s.w. Ein menschliches Gesetz, was für ein Unsinn!
Es stimmt, dass der Staat eine Verschwörung ist, um
die Bürger auszubeuten und vor allem um sie zu verderben."
Und in seinem Tagebuch steht für diesen Tag geschrieben:
"Dick, weiß, gesund der Nacken und die Brust",
ein tolstojsches Detail, bei dem es einem kalt den Rücken
hinabläuft. "Die Guillotine ließ mich lange
nicht einschlafen, und ich musste mich dauernd umblicken."
Tolstoj wurde von Alpträumen heimgesucht, von denen
er nahen Freunden wie Turgenjew erzählte: "Er
sah die Guillotine im Traum. Ihm schien, er selbst wäre
es, den man zum Tode verurteile; als er aufwachte, bemerkte
er an seinem Hals einen Kratzer, erschrak fürchterlich
und deutete ihn dahingehend, dass der Teufel ihn gekratzt
hätte
und plötzlich war er verschwunden,
den nächsten Brief schrieb er von den Ufern des Genfersees."
Die Guillotine hatte Tolstoj sein bisheriges Leben mit einem
Schlag abgehauen. Sein Leben bis hin zu seiner Flucht an
den Lac Léman. Und in diesen 28 Jahren hatte er so
viel erlebt, wie es anderen für ein ganzes Leben reichen
würde.
Das Studium an der Universität von Kasan hatte ihn
enttäuscht, er warf es über Bord. So würde
es noch mit so vielem sein, das er in seinem Leben in Angriff
nahm, abgesehen von seinem Schreiben. Nichts konnte er richtig
zu Ende führen, weder im Pädagogischen noch im
Militärischen, weder als Herr seines Guts noch als
gesellschaftlich öffentlich Wirkender. Aus Kasan kehrte
er auf sein Gut in Jasnaja Poljana zurück in der Absicht,
dort tief greifende Reformen durchzuführen, sein Gewissen
rief ihn, doch es endete alles in einem Fiasko. Er ging
zu seinem Bruder in den Aktivdienst in den Kaukasus, ihm
schwebte eine Militärkarriere vor. Er hoffte, drei
unangenehme Leidenschaften überwinden zu können:
das Kartenspiel, die Wollust und die Eitelkeit. Er schaffte
weder das eine noch das andere, dafür gelang ihm das,
was ihn zu Tolstoj macht: Die Publikation seines Buchs Kindheit,
des ersten Teils der Trilogie Kindheit, Knabenalter, Jünglingsjahre,
veränderte sein ganzes Leben und bestimmte sein weiteres
Schicksal.
1852, im Todesjahr Gogols, publizierte in Russland ein neuer
Schriftsteller, der damals noch unter den Initialen L.N.
schrieb. Er fand sogleich Anerkennung. Nach dem Erscheinen
von Knabenalter meinte Turgenjew: "Hier ist endlich
ein Nachfolger für Gogol."
In Meine Beichte schildert Tolstoj, wie er mit 26 Jahren,
nach dem Krimkrieg, wo er an der Verteidigung Sewastopols
teilgenommen hatte, nach Petersburg kam und in einen Schriftstellerzirkel
aufgenommen wurde: "Die Lebensanschauung dieser Menschen,
meiner Kameraden im Schriftstellerberuf, bestand darin,
dass das Leben im allgemeinen sich fortschreitend entwickle,
dass an dieser Entwicklung wir, die Männer der Gedankenarbeit,
den größten Anteil hätten, und unter den
Männern der Gedankenarbeit den größten Einfluss
wir - die Künstler, die Poeten."
Hinter diesen Worten verbirgt sich nicht nur sein literarischer
Erfolg, dahinter steht auch so etwas wie ein Glaubensbekenntnis.
"Dieser Glaube an die Bedeutung der Poesie und an die
Fortentwicklung des Lebens war ein Glaube, und ich war einer
seiner Priester." Er erwarb sich so nicht nur Ruhm,
Geld, Erfolg und Frauenlob, sondern auch die Hoffnung auf
Unsterblichkeit. Doch ihm konnte das nicht genügen.
Und so kamen Tolstoj, dem Priester, Zweifel auf: "Im
zweiten, besonders aber im dritten Jahre dieser Art zu leben
fing ich an, an der Unfehlbarkeit dieses Glaubens zu zweifeln",
schreibt er über diese Zeit, die ihn auch ins Ausland
führte. Die Hinrichtung in Paris versetzte diesem seinem
Glauben den Gnadenstoß.
Tolstojs Meine Beichte kam erst 1879, mehr als zwanzig Jahre
später, zustande. Er schreibt: "Als ich sah, wie
das Haupt sich vom Rumpfe trennte, und wie eines nach dem
anderen auf den Boden der Kiste aufschlug, begriff ich,
nicht mit dem Verstand, sondern mit meinem ganzen Wesen,
dass keinerlei Theorie von der Vernünftigkeit des Seienden
und des Fortschritts dieses Verbrechen rechtfertigen könne
und dass ich, auch wenn alle Menschen in der Welt, von der
Erschaffung der Welt an gerechnet, gleichviel welchen Theorien
sie anhängen, je gefunden hätten, dies sei notwendig
- dass ich dennoch weiß: Es ist nicht notwendig, es
ist schlecht. Über das, was gut und notwendig ist,
richten nicht etwa die Worte und die Taten der Menschen,
auch nicht der Fortschritt, sondern richte ich mit meinem
Herzen."
Die Hinrichtung in Paris erwies sich als die große
Bruchstelle im Leben Tolstojs. Von nun an gehörten
Protest, Aufstand, Verneinung ganz bewusst zu seinem Wesen.
Jetzt kündigte Tolstoj der Weltordnung den Krieg an.
Aus einem Brief an Botkin erfahren wir: "Was sicher
ist, künftighin werde ich niemals irgendeiner Regierung
dienen."
Michail Schischkin, Montreux-Missolunghi-Astapowo,
Auf den Spuren von Byron und Tolstoj: Eine literarische
Wanderung vom Genfersee ins Berner Oberland, Aus dem Russischen
von Franziska Stöcklin, 2002, 320 Seiten, gebunden
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