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                      [...] 
                      D'après Peter Stamm, ce recueil de nouvelles évoque 
                      ce "moment avant un hold-up", où la vie 
                      pourrait basculer. L'écrivain ne sort toutefois pas 
                      la grosse artillerie. Ses phrases sont cristallines et ses 
                      personnages ordinaires. Tous ne font pas le saut (vers soi, 
                      vers l'autre, dans l'inconnu) dans D'étranges 
                      jardins où ils avancent sans boussole. Chacun 
                      garde sa part de mystère sous la plume de Peter Stamm, 
                      qui effleure et non effeuille les secrets, qui attire l'attention 
                      sur des détails et puis s'éclipse. 
                    Peter Stamm observe, montre, n'analyse 
                      pas. [...] Ici, les séismes sont intimes et on ressent 
                      d'autant plus leurs secousses que l'auteur n'en dit presque 
                      rien. Telle est la force de l'Alémanique qui suggère 
                      tant et si peu de mots, en dix par exemple - "elle 
                      n'était pas venue à bout de l'obscurité" 
                      - dans la poignante nouvelle éponyme, l'une des plus 
                      réussies de ce recueil un brin inégal, kaléidoscope 
                      du désarroi contemporain, composé de onze 
                      extraits de vie. "Il s'en était passé 
                      trop et trop peu, pour qu'on se quitte le coeur léger": 
                      cette phrase cueillie dans D'étranges jardins 
                      traduit bien son climat mélancolique. 
                    D'étranges 
                      jardins, traduit de l'allemand par Nicole Roethel, Christian 
                      Bourgois, 2004 
                    Elisabeth Vust 
                        
                       
                      14.09.04  
                      
                    [...] 
                      Il n'y a pas de suspense dans ces nouvelles, mais on y est 
                      accroché, ferré comme un poisson au bout d'une 
                      ligne vicieuse. Peter Stamm varie les angles de prise de 
                      vue, change les décors, les situations, mais c'est 
                      toujours la même impasse pour les personnages qui 
                      assistent, impuissants, au désastre. 
                    Pour autant, pas de quoi se jeter 
                      par la fenêtre après l'avoir lu. L'écrivain 
                      est beaucoup trop subtil pour faire appel au registre mélodramatique. 
                      [...] Pénétrez donc sans appréhension 
                      dans ses Étrange Jardins : il y pousse de 
                      curieuses plantes, des fleurs fragiles aux noms simples 
                      à retenir, comme Regina, Henry, Eric, Ruth, David. 
                      De loin, elles semblent toutes identiques. Pourtant, en 
                      s'approchant, on découvre que chacune a ses couleurs, 
                      son parfum, sa façon de résister aux éléments, 
                      de dire qu'elle appartient encore, pour quelques lunes, 
                      au monde des vivants. 
                    D'étranges 
                      jardins, traduit de l'allemand par Nicole Roethel, Christian 
                      Bourgois, 2004 
                      
                      02.09.04  
                      
                    [...] 
                      Il est toujours plus ou moins question d'attente et de vide, 
                      et du vide de l'attente, puisque rien n'arrive vraiment. 
                      D'une vie à l'autre, David, Regina, Eric, Ruth et 
                      les autres dérivent ainsi dans la conscience aiguë 
                      de leur propre impuissance, arpenteurs sans repères 
                      de leur désert intérieur. [...] Comme l'idéalisme, 
                      l'humour, ici, a les ailes coupées. [...] Dénuée 
                      de tout artifice, sans effets de manche, sans béquilles 
                      narratives, sans recours à la psychologie, son écriture 
                      distille un trouble paradoxal, alliant douceur et cruauté. 
                      et de ce dénuement extrêmement maîtrisé 
                      naît l'inattendu vertige de la simplicité. 
                    D'étranges 
                      jardins, traduit de l'allemand par Nicole Roethel, Christian 
                      Bourgois, 2004 
                    Judith Steiner 
                        
                     
                      
                     
                    [...]  
                      Toute la beauté ambiguë D'étranges 
                      jardins, de Peter Stamm, réside bien là. 
                      Ses personnages croient à l'accomplissement prochain 
                      de leurs rêves mais nous, non, on n'y croit pas vraiment. 
                      A quoi, pour l'instant, ressemblent leurs vies ? Maladresses, 
                      pièces de théâtre au rideau déjà 
                      tombé, immense fatigue, chaussures trop usées. 
                    [...] 
                      L'écriture atone de Peter Stamm fait penser à 
                      des paroles chuchotées. Comment cerner ces hommes 
                      et femmes ordinaires si ce n'est en s'approchant de leurs 
                      existences en silence ? Tout est nuance et détail. 
                      L'expression "matière à lire" sur 
                      une liste, la description d'un appartement de fonction, 
                      des flocons de neige, un portail fermé à clé. 
                      C'est triste ou joyeux ? On ne sait pas. L'appartement se 
                      révèle confortable, le portail s'escalade 
                      aisément, la neige devient belle à regarder, 
                      le mot "matière". On est dans du possible 
                      mais, il est vrai, du possible tellement fragile. 
                      [...]  
                    D'étranges 
                      jardins, traduit de l'allemand par Nicole Roethel, Christian 
                      Bourgois, 2004 
                    Marie-Laure Delorme 
                      Journal du Dimanche 
                      19.09.04 
                      
                    "Je n'ai aucune envie d'être 
                      ici": ce constat d'un personnage dans D'Étrange 
                      Jardins [...] de Peter Stamm, décrit une disposition 
                      intérieur qui [...] caractérise la plupart 
                      de ses protagonistes. 
                    [...] 
                      Habile dans le non-dit et la mise en valeur du détail 
                      qui fait mouche, Stamm excelle à suggérer 
                      les sentiments et à créer une ambiance. Le 
                      lecteur, presque trop bien guidé par un auteur qu'on 
                      souhaiterait parfois un peu moins omniscient, se voit plongé 
                      dans un monde sans promesses, morne, froid, cruel, où 
                      tous les liens se défont et où "le coeur 
                      se nourrit de vie perdue". Restent pourtant, pour détendre 
                      cette prose si concertée, quelques traits d'humour 
                      et de satire, et la variété des perspectives, 
                      dont on reste libre de déduire, avec un personnage, 
                      que "le bonheur, c'est une manière de voir les 
                      choses". 
                    Wilfred Schiltknecht 
                        
                       
                      
                    Certes, d'autres nouvelles sont construites 
                      de façon plus complexes, comme les jeux amoureux 
                      d'un trio autour de la question suivante: le sexe nie-t-il 
                      l'amour? Mais généralement, les scénarios 
                      des textes de Peter Stamm sont étonnamment simples. 
                      [...] 
                      L'écriture épurée, la construction 
                      millimétrique de ces petits textes, permet à 
                      Peter Stamm de situer ces nouvelles sur le fil d'un rasoir. 
                      Là où l'on sent que tout pourrait basculer 
                      dans la dérision, le drame ou plus rarement le bonheur. 
                      Un livre tout à fait remarquable. 
                    Jacques Sterchi 
                        
                       
                      28.08.2004 
                      
                    Si parfois le début d'une 
                      piste "romanesque" se laisse entrevoir, l'ombre 
                      d'une une péripétie qui pourrait détourer 
                      [la] vie [des personnages], le narrateur préfère 
                      souvent bifurquer pour l'éviter. 
                      Les atmosphères varient subtilement, cultivant l'ambiguïté, 
                      jusqu'à l'extrême "Deep furrows", 
                      presque lynchien, qui inquiète comme un rêve, 
                      au bord du fantastique, où le lecteur ne sait s'il 
                      est question de fantômes. Enfin si "La Halte" 
                      et "L'Expérience" sont plus faibles et 
                      paraissent hors de propos, ce recueil laisse une empreinte 
                      durable: les ciels des jardins de Stamm filtrent une lumière 
                      douce et mélancolique, déclinant les gris, 
                      mais avec chaleur et sans monotonie. 
                    Julien Burri 
                        
                      No 62 - septembre 2004 
                     
                      
                    
                    Page créée le: 05.10.04 
                      Dernière mise à jour le 08.10.04 
                      
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