Robert Walser
Seeland, Proses, Traduit de l'allemand par
Marion Graf, Editions Zoé, 2005, 224 p.
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Retrouvez également
Robert Walser dans nos
pages consacrées aux auteurs de Suisse.
Robert
Walser / Seeland |
ISBN 2-88182-523-0
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Un des écrivains de
langue allemande les plus importants du XXe siècle,
Robert Walser a publié, à côté
de trois romans, beaucoup de nouvelles et de proses
brèves. Les Editions Zoé poursuivent
le programme de leur publication. Après Retour
dans la neige , Nouvelles du jour , Le Territoire
du crayon et louvrage sur son écriture
micrographique : Robert Walser, lécriture
miniature , voici Seeland.
Seeland
il y a dans
ce mot quelque chose de magique.
Seeland, ce peut être partout, en Australie,
en Hollande ou ailleurs.
Après ses années
berlinoises et avant de sinstaller à
Berne, Robert Walser passe sept ans à Bienne,
sa ville natale (1913-1921). Plusieurs recueils paraissent
durant ces années, dont Seeland. Cet
ensemble de six nouvelles constitue laboutissement
de la période biennoise de lécrivain,
avec sa dualité caractéristique de ferveur
romantique et de truculence, de rêverie et de
réflexion, dobservation espiègle
et dabstraction.
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Les principaux motifs qui préoccupent Walser
à cette époque sentrecroisent
dans ces textes: la promenade, surtout, comme façon
dêtre au monde et aux mots. Le paysage
est même au centre du livre, dont le titre évoque
la région du lac de Bienne. Dautres personnages
relaient le flâneur : Hans le rêveur impénitent
appelé au service militaire ; le peintre en
début de carrière ; ou encore, sept
enfants prononçant lépitaphe de
leur père. Au centre de ce recueil mûrement
composé par le poète, lun des
textes les plus célèbres de Walser,
à la fois fantaisie et art poétique:
« La promenade », présentée
ici dans son contexte et dans une nouvelle traduction.
Robert Walser, né
à Bienne en 1878, est mort à Herisau
en 1956.
Préface et
traduction de Marion Graf
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Robert
antipater (par Francesco Biamonte) |
Robert antipater
Il y a quelques années,
alors un éminent spécialiste de
Robert Walser me dit en souriant avec un brin
de malice que tout auteur ou lettré de
plus de cinquante ans que j'aurais interrogé
sur l'auteur biennois aurait commencé
par me dire qu'il avait été le
premier à le lire, à une époque
où il était inconnu. J'eus l'occasion
peu après de demander au téléphone
à Paul Nizon s'il accepterait d'écire
un petit texte sur Walser pour une revue littéraire.
Il commença par préciser qu'il
lisait Walser alors que personne ne le connaissait
encore, et refusa d'accéder à
ma requête avec ces mots prononcés
sur un ton un peu agacé : " Vous
comprenez, écrire sur Robert Walser aujourd'hui,
c'est comme écrire sur Guillaume Tell
".
C'est vrai. Walser semble
être devenu la nouvelle figure tutélaire
de la littérature suisse. Tandis que
Frisch et Dürrenmatt, naguère dioscures
ou saints patrons des lettres helvétiques,
glissent peu à peu dans le domaine paléonthologique,
Walser en devient le nouveau père. Avec
ceci de particulier que contrairement à
Tell, il n'a rien de paternel ni d'héroïque,
et que l'on ne veut pas le partager - c'est
aussi cela que trahissait l'agacement de Nizon.
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Tout est là : on veut discuter
et débattre de Frisch et Dürrenmatt, mais on
préfère être seul avec Walser ; et ses
lecteurs ont presque tous en eux la conviction d'être,
sinon les premiers et les seuls, du moins les plus intimes.
C'est peut-être cette manière profondément
engagée d'être au monde, d'être rebelle
sans être le moins du monde politique, d'être
inclassable et impossible à récupérer
parce qu'infiniment individuel qui rend Walser si cher à
tant de personnalités et de tempéraments différents,
dans une époque revenue des utopies et souvent dégoûtée
des idéologies - y compris de celles qui la gouvernent
; une époque qui ne peut ni ne veut plus envisager
l'engagement civique et politique comme on le faisait il
y a encore un quart de siècle, mais souffre de ne
plus participer au monde, à l'humanité et
à son renouveau avec la même intensité.
A cette génération, Walser tend la preuve
vivifiante (un mot qui revient souvent à son sujet,
et qui lui va vraiment très bien) que ce qu'elle
cherche peut exister : son écriture témoigne
d'un éveil amoureux face au monde, et d'un pouvoir
subversif toujours neuf, complètement personnel.
Walser écrivit " Nul n'est autorisé à
se conduire comme s'il me connaissait ". Et pourtant
: en dépit de leurs manières surraffinées
et de leurs faux-fuyants, quel autre rapport que l'intimité
ses textes nous ouvrent-ils ?
On peut penser à tout cela
et à bien plus en lisant le dernier numéro
paru du Passe-Muraille, le journal littéraire
dirigé par Jean-Louis Kuffer : Antoni Moeri, Matthias
Zschokke, Fabio Pusterla, Jacques Roman, s'y expriment dans
des textes très personnels, justement, témoignant
de l'intimité spécifique que chacun entretient
avec Walser. On croise par ailleurs dans cet excellent numéro
le Guillaume Tell (tiens tiens) d'Alfred Berchtold
(livre du
mois sur nos pages en janvier 2005) mais aussi un compte-rendu
passionnant du même Moeri sur le Pladoyer en faveur
de l'intolérance de Slavoj Zizek : nous le citons
ici parce qu'il s'y retrouve la préoccupation d'une
époque où le " tout se vaut " d'un
post-modernisme mal compris dépolitise désespérément
l'espace social. L'avènement de l'individu attendu
dès l'ère romantique et que la démocratie
semblait promettre menace aujourd'hui d'échouer :
bien des êtres sont projetés dans l'égarement
plutôt que dans la liberté, avec pour corollaire
l'apparition d'identités et d'appartenances d'autant
plus rigides qu'elles sont factices ou décoratives,
incapables de se mettre en tension entre elles ou de porter
des dimensions universelles. En nous promenant avec Robert
Walser, nous nous persuadons à nouveau que cette
individualité irréductible et ouverte au monde,
au quotidien, à l'art, est possible. Autant de résonnances
que complète l'inédit de tête du Passe-Muraille,
de Walser justement, et où il est question de la
joie de lire
le journal.
Par Francesco Biamonte
Page créée le: 13.07.05
Dernière mise à jour le: 13.07.05
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