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Bernard Campiche Editeur

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Collection CamPoche

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  Jacques-Étienne Bovard / Une leçon de flûte avant de mourir

Jacques-Étienne Bovard / Une leçon de flûte avant de mourirBelle histoire d'amitié, Une leçon de flûte avant de mourir, de Jacques-Étienne Bovard, marque une avancée de l'écrivain dans le sens de l'empathie.

Avec quatre romans et deux recueils de nouvelles, dont les très populaires Nains de jardin, Jacques-Étienne Bovard est devenu, avant le cap de la quarantaine, l'un des auteurs romands les plus appréciés du public. Cela ne fâche que les fâcheux, mais ce qui nous réjouit plus encore tient au constant élargissement des registres de l'écrivain, et à l'approfondissement de sa perception des choses. La transition des Nains de jardin au roman plus ample et plus grave que constituaient Les Beaux Sentiments fut très remarquable à cet égard, et c'est un pas de plus encore qui nous semble franchi avec Une leçon de flûte avant de mourir. De fait, le romancier parvient à y combiner son goût de la pointe satirique (avec le portrait carabiné d'une concierge acariâtre) et les éléments d'une observation plus généreusement empathique, qui s'incarnent notamment dans le très beau personnage d'un vieil homme revivant positivement dans le partage de sa passion pour la musique...

Jacques-Étienne Bovard est né à Morges en 1961. Parallèlement à son métier de maître de français, il bâtit une œuvre composée essentiellement de romans et de nouvelles, la plupart ancrés dans les paysages et les mentalités de Suisse romande, qu'il considère comme un terreau hautement romanesque à maints points de vue. Menant une vie des plus ordinaires, mais passionné de beaucoup de choses, Bovard nourrit ses livres de ses visites transfigurées dans divers mondes, notamment l'équitation (Demi-sang suisse, 1994), l'enseignement (Les Beaux Sentiments, 1998) la photographie (Le Pays de Carole, 2002), la musique (Une leçon de flûte avant de mourir, 2000), la pêche (Ne pousse pas la rivière, 2006). Son penchant pour le comique l'a poussé aussi à commettre les nouvelles de Nains de jardin,(1996), dont le succès ne faiblit pas, de la même veine que son roman La Griffe (1992) récemment réédité. Première approche autobiographique, La Pêche à rôder (2006) conjugue écriture et photographie. Couronné de nombreux prix, Jacques-Étienne Bovard fait partie des auteurs suisses romands les plus réguliers et les plus largement reconnus par le public. Son dernier roman, La Cour des grands (2010), rencontre un vif succès.

Jacques-Étienne Bovard, Une leçon de flûte avant de mourir, Bernard Campiche Editeur, 2011.

 

  Antonin Moeri / L'Île intérieure Les Yeux safran

 

Antonin Moeri / L'Île intérieure Les Yeux safranQuand j'avais lu ces livres, j'avais été frappé par l'originalité de cette voix neuve. L'écriture y est servie par une distance ironique qui rend certains passages d'une drôlerie irrésistible. Elle est précise et joue sur des expressions toutes faites reprises avec ce même tremblement qu'on trouve chez Flaubert lorsqu'il utilise des clichés: un écho de pièce vide fait résonner les mots, empêche qu'on les prenne au premier degré mais refuse le deuxième degré souligné, reste entre deux. Dans L'Île intérieure, Moeri ne découpe pas son texte en paragraphes. Ce n'est pas gratuit, ça donne un rythme et une signification par le refus de hiérarchiser, de dissocier les événements: ils se retrouvent au même plan et concourent ainsi à la description de l'absurdité.
Le même effet se trouve dans son premier texte publié, prix de la revue [vwa], et dans son premier roman: Le Fils à maman (Poche suisse), de même que s'y retrouvent des thèmes et le type de narrateur-personnage: un être falot, pâle, maigre, névrosé. Ici, c'est un acteur raté que handicapent des difficultés respiratoires. Le roman l'oppose à sa sœur, qu'il aime d'une manière ambiguë, musicienne exceptionnelle, pure, privilégiée, active. On y trouve aussi des discours sur l'écriture, sur l'artiste et sa fonction (jeter des perles aux pourceaux, leur dispenser une sorte de luminosité intense) et toutes sortes d'épisodes liés par aucune nécessité autre que l'écriture et la vision singulière du narrateur.
Ça commence dans une soirée mondaine, prétexte à impairs et présentation du personnage. Puis on voit le frère, la sœur lui propose de partir à Djerba, il y croise quelques personnages singuliers.
Dans Les Yeux safran, il s'agit d'autre chose. Safran, c'est la couleur de la mort: celle de la mère du narrateur, atteinte d'un cancer, et qui s'éteint petit à petit devant lui tandis que sa peau jaunit. Insomniaque et perdu, le fils s'efforce de capter, avec une extrême attention, les réactions intimes que les souvenirs ou les rêves sur elle provoquent.
Cette agonie et cette mort provoquent un déclic: le narrateur se met à écrire pour reconstruire son existence.
Les souvenirs évoquent Louis, l'ami d'enfance qui apprenait à fumer dans une cave, à voler à l'étalage ou à embrasser Caroline. On retrouve les portraits chargés dans lesquels Moeri excelle: un athlétique contrôleur de chemins de fer, «homme aux yeux globuleux d'un bleu transparent fichés aux extrémités d'un visage massif comme des boutons de culotte sur le masque burlesque d'un épouvantail». Un intellectuel: «Quand on lui demande de décrire ses occupations, il répond en enlevant ses fines lunettes de son auguste nez: je fais de la recherche. Sur quoi tout le monde se tait. La phrase a été martelée avec une telle assurance qu'on se dit: quelle surprenante arrogance de roquet chez cet âne accoutumé au silence».
C'est que Moeri, à l'époque, en voulait aux individus plus qu'à la société. Fidèle disciple de Handke et de Thomas Bernhard, il empruntait à ce dernier l'invective et l'indignation. Dans le livre, il s'attache aux personnages, les suit dans l'avion, sur la plage, marchant. Tourne autour des images, recherchant des états de musique et de délire verbal. Pour écrire ensuite, la nuit, en vacances, en altitude, après un grand effort physique, dans des conditions de malaise existentiel et de solitude, des histoires vengeresses.

Antonin Moeri est né à Berne. Après ses premières années vécues à Mexico, il poursuit sa scolarité sur les rives du Léman, dans la région de Vevey. Adolescent, Antonin Moeri part à Genève pour y étudier à l'Université. Après avoir suivi les cours de l'École d'art dramatique de Strasbourg, il exerce le métier d'acteur en France et en Belgique. Traducteur de Theodor Fontane, de Robert Walser et Ludwig Hohl, il écrit cinq livres parus aux Éditions L'Âge d'Homme : Le Fils à maman en 1989 pour lequel il obtient le Premier Prix au concours littéraire de la revue [VWA]; L'Île intérieure en 1990; Les Yeux safran en 1991; Allegro amoroso en 1993 pour lequel il obtient le Prix Schiller 1994; Cahier marine en 1995. En 1998, il publie aux éditions Bernard Campiche: Igor, suivi, en 2000, d'un premier recueil de nouvelles, Paradise Now, en 2003, d'un deuxième recueil de nouvelles, Le Sourire de Mickey. En 2007, il publie aux Éditions Bernard Campiche le roman Juste un jour. Antonin Moeri vit et travaille à Genève. Il séjourne une partie de l'année à Cully.

Antonin Moeri, L'Île intérieure Les Yeux safran, Bernard Campiche Editeur, 2011.

 

Page créée le 01.12.11
Dernière mise à jour le 01.12.11


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