Chronique des géraniums
en fleurs (2)
Les géraniums ont fleuri
tout lété, même tout lautomne
et jusquà fin novembre. Ça se
passe ainsi dhabitude.
On na plus fait de photographies.
Sauf une fois, le 1er octobre. Pourquoi ? On ne sait
pas. Elle lavait pourtant dit, la voisine de
palier, une dame qui sintéresse aux fleurs
mais pas à la littérature : " Cest
maintenant quil faut les photographier, cest
maintenant quils sont beaux ! " Cétait
le 31 juillet un peu après lheure du
repas. Il faisait chaud. Le soleil brillait. Cétait
lété en plein, les vacances.
Puis le samedi 18 novembre,
les géraniums ont été rentrés
par crainte des gelées matinales. Ils étaient
tous en belle floraison. Une fois encore, on les photographiait.
Dans la cuisine. Un ange veillait sur eux. Il était
là resté suspendu depuis le dernier
Noël. Il faut y voir un signe.
Et le dimanche matin, ils sont
descendus à la cave. Pas tous. Trois sont restés
dans leurs pots suspendus au bord de la fenêtre,
condamnés à fleurir jusquau gel.
Ils en pleurèrent, on en pleura, on sapitoya
sur leur sort, ils apprivoisèrent leur destin.
Le 2 décembre, ils fleurissent encore et donnent
toujours des boutons sous le pâle soleil clair
de lhiver, de lextrême automne plutôt,
ce genre de soleil anémié qui embrase
un après-midi mais vous donne jusquau
soir la migraine. Quand la veille de Noël arrive,
ils sont toujours dehors et en fleurs.
Les autres sont à
la cave, sans fleurs, presque sans feuilles, tondus
ras. Ils somnolent, ils hibernent. De temps en temps,
il faut descendre leur parler et les arroser.
(C) jean-pierre.cousin@bluewin.ch
di 19/11 di 24/12/2000